CHAPITRE XXIV
Le 7 janvier 1955 Jésus, qui l’avait maintenue en vie de
façon extraordinaire, lui susurrait :
— Il n’y a plus de souffrances à inventer pour toi.
Puis, Il l’avertit :
— Ma fille, c’est ton année. Aie confiance en Moi. Je
ne manque jamais à ce que Je promets. Mes promesses de Seigneur suprême et
omnipotent sont tout près de se réaliser. Ta mission sur la terre se
terminera bientôt : aie confiance. Le ciel est à toi. Là-haut tu continueras
ta mission.
Le 25 mars, fête de l’Annonciation, Il le lui rappelle :
— Il ne reste plus guère de temps pour que t’arrives
au sommet. Tu diras ton Consummatum est et tu t’envoleras vers le
ciel.
Les avertissements de Jésus se poursuivirent.
A mois d’avril, Il lui parla encore “de la dernière
phase de sa vie” et lui révéla qu’elle ne pourrait être davantage
douloureuse... Mais Il ajouta :
— Ton ciel est tout proche.
Le 13 mai l l’exhorta :
— En avant, courage ! Accroche-toi à Moi, Ma fille.
Viens, Je suis ton Jésus.
Le 26 août 1955 Jésus lui révéla :
— Mes colloques avec toi seront comme une rencontre
entre amis qui se rappellent leur ancienne amitié. Ta lente disparition
commence.
Le 2 septembre, lors du dernier et très bref extase, Il
la consola :
— Ne m’as tu pas dit si souvent que tu voulais te
consumer et disparaître dans mon Cœur ? Courage, courage ! J’ai pris à la
lettre tout ce que tu me disais.
Deux vendredis de suite, au mois de septembre, le prêtre
étant absent de la paroisse, Alexandrina reçut la Communion de la main des
anges. La première fois ce furent trois anges qui la lui portèrent ; la
deuxième fois, ils étaient une multitude. Délicatesses divines.
Le 2 octobre Alexandrina se tourna tout d’un coup vers
Deolinda et lui dit :
— Aujourd’hui c’est la fête des Anges. Ce matin
j’ai senti que l’un deux me touchait l’épaule, et en même temps, j’ai
entendu ces paroles : Qui chantera avec les anges. Toi... toi... toi...
Bientôt, bientôt.
Le 12 octobre à deux heures, alors que Deolinda lui
remettait en ordre le lit, Alexandrina lui demanda d’appeler son confesseur,
le Père Alberto Gomes, pour le remercier et obtenir son autorisation pour
faire un acte de total renoncement.
À sept heures, elle reçut la Communion des mains de
Monseigneur Mendes do Carmo, du diocèse de Guarda, qui célébrait dans sa
chambre.
Jésus lui parla :
— Viens au ciel, viens au ciel !
À quinze heures, le Curé, le confesseur, Monseigneur
Mendes do Carmo, le docteur Manuel Augusto Dias de Azevedo et tous les
membres de la famille entrèrent dans la chambre. Ils s’agenouillèrent tous.
Alexandrina récita son acte de total renoncement :
— O Jésus Amour, ô divin Époux de mon âme, je veux, à
l’heure de ma mort, vous faire un acte de renoncement à tout et à tous.
Puis, aussitôt elle ajouta l’acte d’acceptation de la
mort :
— Mon Dieu, comme je vous ai toujours consacré ma vie,
je vous offre aussi ma fin dernière, en acceptant avec résignation la mort
et toutes les circonstances qui Vous procureront la plus grande gloire.
Puis, d’une voix claire, elle demanda pardon à tous et
les remercia. Elle promis de se souvenir de chacun au ciel.
Le Curé lui administra l’Extrême-onction. Par trois fois
le visage d’Alexandrina s’éclaira d’un sourire, alors que son regard
semblait rempli de joie.
Puis, se tournant vers les personnes présentes et qu’elle
voyait en pleurs, elle dit :
— Ne pleurez pas, car je vais au ciel.
Elle murmura à peine :
— O Jésus, je ne peux plus rester sur la terre... J’ai
tant souffert, en cette vie, pour les âmes.
Je me suis pressée, je me suis consumée sur ce lit,
jusqu’à donner mon sang pour les âmes... O Jésus, pardonnez au monde entier
!... Je me sens si heureuse d’aller au ciel”.
Son regard très doux était tourné vers le haut,
transfiguré par un lumineux sourire.
Le médecin traitant s’approcha d’elle, avant de la
quitter. C’est la nuit du 12 ; Alexandrina lui parle :
— Docteur, comme vous aviez raison. Quelle lumière !
Les ténèbres sont disparues. Tout a disparu... Que de lumière...
La nuit du 12 au 13 octobre, fut une nuit d’agonie.
A l’aube, Alexandrina demanda à Deolinda de lui faire
baiser le Crucifix et la médaille de Notre-Dame des Douleurs. Un doux
sourire effleura ses lèvres.
— À qui souris-tu ? — demanda Deolinda.
— Au ciel !
À huit heures elle reçut encore la Communion.
Ce fut sa dernière.
Dans la matinée beaucoup de personnes vinrent la visiter.
A un groupe de personnes, elle recommanda :
— Ne péchez pas. Le monde ne vaut rien. Communiez
fréquemment. Récitez le Rosaire tous les jours. Adieu, nous nous reverrons
au ciel.
Vers onze heures, elle se tourna vers le médecin traitant
et lui dit avec joie :
— Le moment approche !
On dirait qu’elle-même faisait la chronique de sa mort.
À 11,25 heures elle dit :
— Je suis heureuse, car je vais au ciel.
Le médecin lui recommanda :
— N’oubliez pas... priez beaucoup pour nous...
Alexandrina fit un signe d’acquiescement.
Deolinda, à 19,30 heures lui dit tout bas :
— Oui, au ciel, mais pas tout de suite...
Alexandrina poussa un soupir et murmura tout bas :
— Oui, au ciel... tout de suite... maintenant.
À vingt heures elle embrassa très longuement la Crucifix.
Vingt neuf minutes après, sans le moindre tremblement, sans le moindre
sursaut, elle expira.
C’était un jeudi : “son jour de prédilection” ; 13
octobre : “anniversaire de la dernière apparition à Fatima”.
  
Même dans la mort, elle garda
son doux sourire
Treize ans auparavant, elle avait dicté son testament :
« Je désire que mes funérailles soient celles d’une
pauvre. Que mon cercueil ne soit ni trop beau ni trop démodé, afin de ne pas
attirer l’attention de qui que ce soit. Je veux être habillée de la livrée
des Filles de Marie, mais très modestement.
Si cela n’est pas interdit par l’Église, j’aimerais
avoir sur mon cercueil, beaucoup de fleurs ; non pas parce que je les
mérite, mais parce que je les aime beaucoup. S’il fallait tenir compte de
mes mérites, je ne pourrais en avoir aucune. Je souhaite être inhumée en
pleine terre, et que mon cercueil ne soit pas zingué.
Je ne souhaite pas d’Office funèbre, car ma mère n’a
pas les moyens pour subvenir à une telle dépense.
J’aimerais être inhumée, si possible, le visage tourné
vers le Tabernacle de notre église. Comme pendant ma vie j’ai toujours
désiré m’unir à Jésus au Saint-Sacrement et veiller le plus près possible
sur son tabernacle, de la même manière, après ma mort, je veux continuer de
veiller sur Lui, me maintenant tournée vers celui-ci.
Je sais qu’avec les yeux de mon corps je ne verrai
plus Jésus, mais je veux être placée dans cette position pour lui démontrer
l’amour que je nourris pour la divine Eucharistie.
Je veux que ma sépulture soit entourée de fleurs de la
passion pour rappeler que ma vie durant, j’ai aimé la douleur, et que je
continuerai de l’aimer jusqu’à ma mort.
Mélangées aux fleurs de la passion, j’aimerais avoir
des rosiers rampants, très épineux.
Je veux que sur ma tombe il y ai une croix et près de
celle-ci, une stature de la Maman du ciel. Si possible, j’aimerais qu’une
couronne d’épines entoure la croix.
La douce petite Maman m’a aidée à parcourir mon
douloureux chemin du calvaire, m’accompagnant et me soutenant jusqu’au
dernier moment de mon existence.
J’aime Jésus, j’aime la Maman du ciel, j’aime la
souffrance et ce n’est qu’au ciel que je comprendrai la valeur de celle-ci”.

La foule, le jour de son
enterrement
Un journal de Porto publia le compte-rendu de l’un de ses
correspondants :
« Pendant vingt et une heures consécutives, une foule
immense se rassembla près des portes de l’humble maison des Costa afin de
voir, pour la dernière fois la malade du Calvaire, comme tous l’appelaient. »
À Porto, dans l’après-midi du 15, les fleuristes
n’avaient plus de roses blanches. Toutes avaient été vendues et envoyées à
Balasar : hommage à Alexandrina qui avait été la rose blanche de Jésus.
Un groupe de dévots, fit construire dans le cimetière une
chapelle, tournée vers l’église paroissiale. Elle fut bénie le 13 octobre
1957 par l’Archevêque de Braga, revenu de Rome exprès, pour le cinquantième
anniversaire de l’église de Balasar. Lors de son discours au fidèles, il dit
:
« J’ai parlé au Saint-Père et je lui ai raconté
un certain nombre de choses sur Alexandrina. Sa Sainteté veut être présente
parmi nous en ce jour, par sa bénédiction, pour le cinquantième anniversaire
de la paroisse et pour le deuxième anniversaire de la mort de la « perle
de votre pays » — Alexandrina — dont le monde n’a pas
connut la valeur. »
Après 1975, l’église paroissiale fut agrandie. A côté de
l’autel où se trouve le Saint-Sacrement, un emplacement fut aménagé pour
abriter les restes mortels de la servante de Dieu.
* * *
1 - Il est bon de rappeler que le
lieu-dit où vécut Alexandrina et où elle est morte, portait ce nom
prédestiné. |