Une lettre à Jésus
C’est avec cette
lettre du 19 février 1942 que s’ouvrent les “Sentiments de
l’âme” ― journal spirituel d’Alexandrina. C’est un document vibrant,
littérairement excellent, écrit à la suite du récent départ du Père
Pinho et sans doute recueilli par le Père Umberto Pasquale en 1944.
C’est un cri qui se lève au milieu d’une tempête. Mais la noblesse,
la touche de l’excellence des sentiments exprimés, de la confiance
illimitée en Jésus, de la détermination d’Alexandrina, sont les
mêmes de toujours.
*****
Balasar, le 19 février
1942.
Mon bon Jésus,
Je sens mon cœur
tailladé par la douleur. Aurez-Vous encore d’autres coups à me
porter ? Que votre volonté soit faite. Clouée sur la croix avec
Vous, saignant et dans la plus grande agonie, je me vois et je me
sens abandonnée. Je ne peux pas vivre dans le monde, j’ai peur.
Jésus, venez vite,
venez, emportez-moi au Ciel. Les hommes tente d’écarter de moi, de
m’arracher pour toujours ce qui me procurait quelque soulagement,
qui pouvait me réconforter. Ils m’ont pris mon Père spirituel, ils
lui ont interdit de m’écrire et à moi de ne plus lui envoyer de
lettres. Je suis seule au milieu de la tempête et celle-ci ne se
calme pas.
Je vous ouvre mon
pauvre cœur, Vous seul savez y lire ce qu’y est écrit avec douleur
et sang ; Vous seul comprenez et pouvez évaluer ma souffrance. Le
monde l’ignore, les hommes n’y comprennent rien. Laissez-moi Vous
dire ce que Vous avez dit à votre Père Éternel :
“Pardonnez-leur, mon
Jésus, car ils ne savent pas ce qu’ils font !” Ils sont aveugles, il
leur manque votre divine lumière : éclairez-les tous et donnez à
tous votre amour.
Ô Jésus, tous mes
pressentiments se sont avérés exactes. Pourront-ils encore
m’interdire de vous recevoir sacramentellement ? Pauvre de moi, cela
serait le coup qui m’ôterait la vie, si Vous avec votre divin
pouvoir ne me conservez pas la Communion.
Qu’ils disent ce qu’ils
voudront, qu’ils fassent ce qui leurs plaira, ce qu’ils ne m’ôteront
jamais c’est cette union avec Vous.
Me priver de Jésus
sacramentel, oui, je ne doute pas qu’ils le fassent ; ôter de mon
cœur le très riche trésor que j’adore, que j’aime plus que toute
autre chose, le Père, le Fils, le Saint Esprit, cela, jamais, jamais
les hommes y parviendront : il aurait fallu qu’ils me fassent vivre
sans cœur et sans âme.
Impossible ! Que vienne
la force du monde entier et que toute cette force se jette contre
moi : mais, me séparer de cette grandeur infinie, de cet amour
infini, cela jamais ! Seul le péché, lui seulement pourrait m’en
séparer.
Mais j’ai pleinement
confiance en Vous ; c’est de Vous, mon Jésus, que j’attends tout,
malgré le ressentir de mon âme arrive presque à me persuader : que
je me trompe moi-même : je sens que je ne Vous aime pas, je sens que
je ne peux rien attendre de Vous à cause de ma misère qui est si
grande.
Quelle confusion que la
mienne ! Combien grande est ma détresse !
Soulevez-moi, mon
Jésus, aidez-moi, même ainsi clouée à la crois, à monter tout le
chemin douloureux du calvaire. À chaque escalier par où je passe, je
veux laisser écrit avec le sang que de mes plaies s’écoule :
C’est pour Jésus que je
souffre, c’est pour lui donner des âmes que je chemine !
Jésus, Jésus, je ne
vois pas le Ciel, tout le bleu du firmament s’est éloigné de moi, je
l’ai perdu, on m’a volé ce qui était ma vie. Je ne sens que douleur,
je ne sens et ne vois que la mort. Je n’ai pas à qui recourir : ce
n’est que Vous et la Mãezinha que je peux appeler.
Pauvre de moi ! Combien
de fois à cause de ma souffrance je n’ose même pas Vous regarder !
Écoutez-moi toujours,
même quand je ne vous appelle pas ; demandez à la Mãezinha qu’Elle
m’aide, donnez-moi toute la force du Ciel !
Tous les bruits que
j’entends me rappellent mon Père spirituel. Est-ce lui qui arrive ?
Quelle vie d’illusions !
Chaque pensée qui me
vient en tête sur mon pénible état, ce sont comme des flèches qui se
plantent dans mon cœur, ce sont comme une flagellation qui met en
lambeaux mon cœur et mon âme. Quel mal ai-je fait ? Quel crime ai-je
commis ?
Ô mon Jésus, si ce
n’était pas votre amour, si ce n’était pas cet ardent désir de Vous
donner des âmes, je me refuserais à tout cela. J’aimerais Vous aimer
beaucoup, ne jamais Vous offenser pour gagner le Ciel, mais je ne
voudrais pas — sur la terre — la crucifixion, je ne voudrais point
entendre votre douce voix, je n’aimerais pas regarder votre divine
Image, ni douloureuse ni glorieuse : j’aurais une éternité entière
pour Vous contempler et pour vous entendre parler.
Pardonnez mes
épanchements, Jésus, Vous savez bien que Vous êtes le seul avec qui
je peux m’épancher.
Vous avez voulu me
choisir pour la souffrance, Vous m’avez destinée à de si grands
martyrs, voici votre victime, voici votre esclave, Jésus, faites de
moi ce qu’il Vous plaira.
Accordez-moi ta
bénédiction, mon Aimé. Dis à la Mãezinha qu’Elle me bénisse et me
protège. Je suis ta plus indigne fille, la pauvre
Alexandrina
*****
Les “Sentiments de
l’âme” sont différents des “Lettres”, même de celles adressées au
Père Mariano Pinho. Mais dans les “Sentiments de l’âme” nous
trouvons encore ce qu’elle a dicté avant que ceux-ci ne prennent la
forme définitive de 1942 (cahiers du Père Pinho) et ceux qui courent
de 1942 jusqu’à l’arrivée du Père Humberto. C’est surtout à partir
de l’arrivée de ce prêtre salésien qu’ils acquièrent la forme
définitive.
20 février 1942
Jésus, je viens à votre
rencontre. Où êtes-Vous? Ne pourrai-je pas vous trouver? Entendez au
moins mes plaintes. Si Vous me manquez, je n’ai plus personne. Ne
m’avez-Vous pas vue ce matin clouée en croix avec Vous, dans une
grande agonie, les yeux levés vers le ciel, que j’ai senti et j’ai
vu disparaître sans le moindre espoir de le revoir et encore moins
d’y entrer ? Quelle grande tristesse que la mienne de voir que tout
est perdu et sans le moindre remède !
Une fois descendue de
la croix, j’ai commencé à monter vers le calvaire. J’étais si
faible, si anéantie ! Je marchais péniblement, le visage presque
contre terre ; je tombais ici et là, me blessant douloureusement :
mon corps baignait dans le sang. Combien grande était ma peur de
savoir que dans un instant j’allais être crucifiée et que je n’avais
aucun soutien sur la terre ! Heureusement j’avais l’aide de votre
divin amour : Vous êtes venu à ma rencontre.
― “Ma fille, l’aide
humaine te manque ; aie courage, car l’aide divine ne te manquera
jamais.
Le calvaire est le
chemin de mes élus ; le calvaire est le chemin de mes épouses ; le
calvaire est le chemin de mes crucifiées. C’est par le calvaire que
j’accorde le pardon aux pécheurs ; c’est par le calvaire que je
remplis les cœurs d’amour.
Courage ! Aie courage,
ma petite folle ! Ton Jésus, ta Mãezinha et ton Père spirituel
t’accompagnent, t’aident, dans une intime union!”
― Merci, mon Jésus !
Animée par Vos douces
paroles, je me suis rendue au Jardin des Oliviers. Je nous Vous y ai
pas rencontré, mais votre divine force a vaincu en moi. Dès le
débout j’ai ressenti l’audace avec laquelle les soldats se sont
présentés à Gethsémani pour la capture. J’ai vu qu’à leur tête
Judas, les lèvres pleines de venin. J’ai ressenti sur mon corps les
coups de pied qu’un peu plus tard, alors que l’on me ramenait
attachée avec des cordes, on me donnait. J’ai eu dans mon cœur Vos
sentiments, lors que devant vos yeux vous voyiez tous les péchez et
crimes du monde. Si seulement, par ces souffrances, toutes les âmes
auraient pu être sauvées ! Mais, ô malheur, combien se perdront
encore ne profitant pas de ma souffrance ! Ô Jésus, j’ai senti mon
corps recouvert de sang et mes vêtements collés à lui et à la terre.
Mais plus encore, beaucoup plus encore a souffert votre corps
délicat et divin !
Lors de la flagellation
et du couronnement d’épines vous avez toujours veillé sur moi. A
l’abri et soutenue par un amour aussi si saint et pur, j’ai senti
que mon âme s’enivrait de suavité et de paix et ce fut dans cet état
que je me suis un peu reposée.
La Mãezinha est venue
ensuite : Elle m’a prise dans ses bras, m’a caressée tendrement.
Malgré cela j’ai dû faire appel à Vous et à Elle. En effet, apeurée
par la tristesse et par l’abandon, je défaillait continuellement :
je n’avais pas la force nécessaire pour poursuivre mon chemin.
C’était en vain que j’appelais le ciel. L’abandon était total : il
fallait que je sois seule pour agoniser en croix. Pendant cette
douloureuse agonie une lance est venue se planter dans mon cœur ; il
fallait que j’expérimente toute cette douleur avant d’expirer.
Pauvre de moi, pauvre humanité qui ignore combien Vous avez souffert
pour elle, ô Jésus !
La crucifixion
terminée, j’ai apparemment continué de vivre seule et je me
souvenait avec tristesse du départ de mon Père spirituel.
Une preuve de plus de
votre amour infini, mon Jésus !
Vous avez permis alors
que le Docteur [Azevedo] non seulement s’occupe de mon corps mais
aussi d’amenuiser la profonde douleur qui habitait mon âme. Vous qui
connaissez tout, Vous Vous êtes servi de lui afin de préparer mon
cœur à recevoir cette dernière blessure.
Merci, mon Jésus ; je
ne peux dire que cela : merci. Laissez-moi dire avec Vous : “Mon âme
est triste à en mourir”. J’ai perdu la lumière, j’ai tout perdu.
Accorde-moi ta
bénédiction et ton pardon, mon Amour.
27 février 1942
Jésus, donnez-moi vos
forces divines : je veux ma souffrance et, sans vos forces je n’y
parviendrai jamais. Que mon cœur pleure nuit et jour si vous le
désirez, mais que mes yeux s’illuminent et mes lèvres sourient. Que
votre divin amour et les âmes soient le but de ma souffrance. Je
suis comme la colombe qui dans les airs, jour et nuit bat ses ailes,
mais trouve pas où se poser : seule votre puissance est son soutien.
Les forces lui manquent, elle ne peut plus poursuivre son envol et
tombe, n’ayant personne pour la soutenir, si vous, Jésus, vous lui
manquez.
Jésus, c’est moi qui
flâne dans les airs, c’est que la tempête détruit, je suis la plus
indigne de vos filles, sans lumière et sans protection.
O Jésus, je ne savais
pas que j’avais encore autant à vous donner. Combien grande est mon
ignorance ! Je pensais vous avoir tout donné ; je me suis trompée :
vous êtes venu maintenant faire la dernière récolte. Cueillez tout,
cueillez vite et cueillez-moi ensuite pour vous. Je vous ai donné
définitivement, le 20, et jusqu’à tant que vous voudrez, mon Père
spirituel. Je vous ai donné le 24 toutes les lettres que j’avais de
lui, lesquelles m’ont servi de lumière et m’ont fait cheminer vers
vous. Vous avez vu combien grand fut pour moi ce sacrifice, non pas
à cause de l’attachement que j’ai à ces lettres, mais parce qu’elles
m’ont été demandées en une période de grande douleur. Quand je les
ai prises en main pour les attacher ensemble avec un ruban blanc,
vous avez entendu, mon amour, ce que je me disais ! Jésus me les a
données, Jésus me les a prises. Quand je les ai remises pour ne plus
jamais les revoir, on dirait que tout mon corps a frémit.
Mais, voulant me montrer forte, je murmurais sans cesse : “Jésus
n’est-il pas digne de bien plus encore de sacrifices ? Rien est de
trop pour Lui, Lui qui m’aime tant et a tant fait pour moi ! Rien
est de trop pour le salut des âmes !”
Après cela, j’ai
demandé que l’on décroche du mur sa photo. De ceci, mon Jésus, vous
ne pouvez tirer grand profit pour les âmes, car cette photo avait
peu de valeur à mes yeux et je l’aurais volontiers mise dans le feu.
La seule douleur que m’a causée cet acte ce fut de voir que même
cette photo les dérangeait, alors que moi, je n’avais rien à me
reprocher.
Mon Jésus, cela me
coûte beaucoup d’être cause de souffrances pour les autres !
Regardez toute ma peine et jetez sur moi un regard plein de
compassion.
Mon Jésus, ma
crucifixion approche. Regardez-moi crucifiée sur la croix avec vous,
les yeux levés vers le Ciel, que je ne vois plus, mais criant
toujours : “Jésus, Jésus, pourquoi m’avez-vous abandonnée ?” Je suis
toute seule, l’aide du Ciel et de la terre me manquent. Je
l’accepte, cet abandon, pour vous consoler ; j’accepte tout, et je
souffrirai tout afin que les portes de l’enfer se ferment.
Après la crucifixion
Mon bon Jésus, vous
veillez toujours sur moi, vous me fortifiez toujours par votre grâce
et votre divine puissance. Vous m’avez redonné courage en me
disant :
― “Ma fille, ma petite
folle, c’est dans ta crucifixion qu’est tout le salut des âmes.
C’est dans ta grande souffrance que je trouve consolation et dans
ton immolation totale qu’est ma gloire ; c’est dans ton calvaire que
ma joie est totale. Courage, courage !
Je suis partie vers
Gethsémani. On ne peut pas comparer les angoisses et les tristesses
humaines aux vôtres. Combien avez-vous souffert pour amour de moi !
Aurai-je le courage de vous refuser quelque chose ? Oh! Non, mon
Jésus, non! Donnez-moi la force de ne pas user d’une telle
ingratitude.
Les ténèbres à
Gethsémani étaient accablantes. Toutes les souffrances étaient
épouvantables. Les péchés du monde étaient le pressoir le plus dur
qui serrait mon cœur et le vôtre. C’était le péché, seulement le
péché qui causait toutes ces souffrances ; c’était le péché qui
éloignait de moi le Ciel, me laissant dans plus grand abandon,
m’obligeait à suer du sang. Ce fut le péché, uniquement le péché,
qui fut le bourreau de toute votre Passion. Combien je vous dois,
mon bon Jésus, d’avoir souffert pour moi et de m’associer à vous !
Je ne pouvais déjà plus
résister, mais votre divine voix m’a dit tout bas :
― “Tu as, mas fille,
toujours devant tes yeux, l’amour de ton Jésus!”
O mon Amour, je sens
disparaître de jour en jour, à chaque moment, les forces de mon
corps et de mon âme ! Ce n’est qu’en vous ayant crucifié en moi que
je pourrai vaincre. Je ne vis déjà plus, car tout en moi est mort.
J’ai été flagellée et
couronnée d’épines, puis je me suis reposée dans votre divin Cœur ;
je le serrais très fort contre le mien : m’y accrocher pour toujours
et ne jamais m’en séparer était mon plus grand désir. Il y eut de
courts moments ou vos avez laisser tomber votre grâce sur moi et
quelques rayons de votre Amour ont réchauffé mon cœur.
Quand je me suis
reposée auprès de la Petite Maman du Ciel, ses très saintes lèvres
s’unissaient aux miennes pendant tout le temps de mon repos. Ce ne
sont pas là des consolations, mon Jésus, vous savez bien que tout
cela a disparu pour moi, ce sont des aides que vous me procurez,
sans lesquelles ma crucifixion serait impossible.
Je suis partie vers le
calvaire : à chaque pas je tombais à terre, presque mourante.
Lorsque j’ai été clouée en croix, comme des fontaines le sang
coulait de mes plaies. Les insultes que j’entendais tailladaient
tout mon corps. La souffrance faisait battre tellement mon cœur que
j’avais l’impression que ma poitrine allait s’ouvrir. Vous appeler
au secours, crier vers le Ciel, tout cela était inutile. Autour de
moi tout était ténèbres et abandon, seul me restait une agonie
mortelle.
O mon Jésus, la
crucifixion est terminée, la nuit est déjà bien avancée et, en haut
du calvaire je reste les bras ouverts, clouée à la croix, dans la
nuit la plus triste, en criant toujours : “O Ciel, ô Ciel, ô Ciel,
pourquoi m’as-tu abandonnée ? O terre qui me méprises et me haïs !”
Mon cri se perd dans un
monde d’abandon ; l’écho de ma voix se perds dans un monde sans fin.
Je suis seule, Jésus, je tremble à cause du froid et de la faim. Je
suis aveugle, j’ai perdu la lumière. Le monde n’existe-t-il plus,
mon Amour ? Ce ne sont que ténèbres et aveuglement. Ajouter, mon
Jésus, à cette vie pénible, la douleur que me cause le départ de mon
Père spirituel. Jésus, Jésus, permettez tout, sauf le scandale ; je
ne veux pas que vous soyez offensé et bien encore moins dans ce qui
me concerne. Pardonnez à tous, pardonnez-moi aussi et accordez-moi
votre bénédiction, Jésus.
6 mars 1942
Jésus, mon agonie se
prolonge, mon calvaire n'a pas de fin. Les noires ténèbres de la
nuit ne peuvent jamais finir pour moi ; je ne vois pas le chemin, je
ne peux pas poursuivre ni revenir en arrière ; je n'ai pas de guide,
je n'ai plus de vie. Je sens que mon cœur et mon âme sont réduits en
petits morceaux. Par amour de qui ai-je accepté tout ceci ? Pour
Vous, mon Jésus, seulement pour Vous et pour les âmes. Servez-Vous
de ma tristesse et de mon agonie, servez-Vous du sacrifice qui m'a
mené à l'extrême, pour donner la paix au monde, mon Jésus, pour que
votre divin Cœur puisse recevoir de moi toute la joie, la
consolation et l'amour possibles, afin que soient réalisés tous vos
désirs, pour que les âmes soient sauvées. Si je ne vis pas pour les
sauver, si mes souffrances ne suffisent pas pour leur éviter
l'enfer, rapidement, mon amour, rapidement, prenez-moi alors avec
Vous ; il n’est pas possible de vivre ainsi ; qu’au moins me reste
cet espoir : que mon agonie console votre divin Cœur. Dépêchez-vous,
Jésus, de me secourir ; faites que je reste ferme dans mes
promesses. Donnez à mes lèvres un sourire trompeur dans lequel je
puisse cacher tout le martyre de mon âme ; il suffit que vous seul
ayez connaissance de toutes mes souffrances. Parcourez, mon Jésus,
tout mon corps, mon cœur et mon âme ; voyez s’il y reste quelque
chose que je puisse Vous donner ; je veux tout vous offrir.
L'interdiction faite à mon Père spirituel de s’occuper de moi et
tous les sacrifices qui s’en sont suivis, m'ont amenée à une
souffrance extrême. Et maintenant, mon Jésus, le savoir si près de
moi et moi restant là comme le petit oiseau triste pendant les jours
d'hiver, mourant de faim, sans pouvoir lui parler, sans pouvoir
recevoir de lui aliment et vie pour mon âme, c'est mourir de
douleur.
Que règne pour toujours
votre amour, lui seul peut vaincre.
Je vous ai promis, mon
Jésus, de souffrir en silence, de ne pas laisser échapper une
plainte, tant
que ma poitrine pourra contenir la douleur de ma triste souffrance.
Je n’en peux plus maintenant, Jésus, je me sens complètement
écrasée. Les humiliations, les dédains et les abandons m’écrasent.
J'ai perdu la vie de la terre, j’ai perdu la vie du Ciel ; je suis
inutile pour Vous.
Pauvre âme, qui ne
ressent rien d'autre que peur et terreur ! Triste cœur soucieux de
posséder le sang du monde entier afin d’écrire sur les pavés de tous
les chemins du calvaire, avec des lettres de sang : amour, amour,
amour de Jésus !
Mais elle n’a rien ;
elle ne sert même pas à Le consoler et à L’aimer.
Jésus, écoutez le cri
de mon âme ; je veux seulement vous aimer, et ne jamais pécher. Je
ne suis que misère, je suis un néant ; je me sens honteuse, je me
sens faiblir. Mais ma volonté veut suivre tous les chemins tracés
par Vous.
Mon corps est sur la
croix. Je sens ma tête entourée d'épines sans pouvoir la tourner de
côté et d'autre, ces épines la blessent de façon lancinante. Dans ma
poitrine est gravé le calvaire ; la souffrance de ce calvaire est
très douloureuse, indicible. Mais mes lèvres ne désirent balbutier
qu’une seule phrase : encore, encore, mon Jésus, toujours davantage
de souffrances. La volonté devient folle à l'approche de la
crucifixion ; le corps, la pauvre nature s’épouvante et veut s'en
détacher, il n'a plus de courage pour une telle souffrance. L'heure
approche. Soyez Vous-même, ô mon Jésus, toute la force de votre
petite fille qui apparemment se sent abandonnée de tout et de tous .
(Après la
crucifixion)
L’heure est arrivée,
Jésus, et mon affliction est arrivée à l'extrémité. Je sentais que
je n’en pouvais plus. L'écrasement ouvrait ma poitrine, et Vous
comme toujours, vous êtes venu à mon aide, Vous avez infusé en moi
votre force divine.
― Ô Ma bien-aimée, ma
chère fille, le voilà le chemin, suis-moi ; c'est la vie
douloureuse, c’est le chemin du calvaire. C’est Moi qui t'ai
choisie, c’est pour le salut des âmes, c’est pour ma gloire.
Courage, ma bien-aimée ! J'ai plus de consolation et de joie dans ta
crucifixion que dans toutes les souffrances et l'amour des âmes du
monde entier ! Réjouis-toi, aie confiance ! Tu vas bientôt, très
bientôt recevoir le prix de toutes tes souffrances. Aie du courage !
Ton “Paizinho” est ici pour t’assister avec ton Jésus et ta chère
“Mãezinha”.
J'ai cheminé avec vous,
mon Jésus ; je suis arrivé à Gethsémani, mais déjà si seule ! Je me
rappelais vos divines paroles, elles seules étaient ma force. Là je
ne Vous ai pas rencontré ni ne Vous ai entendu parler. Triste nuit
et quel abandon ! Quelle vague de crimes tombait sur moi. Les
chemins des âmes étaient marqués partout dans le Jardin des
Oliviers. Chacun d'eux était marqué de votre divin Sang. Quelle
tristesse de voir autant âmes quitter leur chemin et même le
mépriser. De tous ces chemins surgissaient des âmes souffrant pour
Vous de façons diverses. Mon doux Jésus, quelle douleur immense pour
votre divin Cœur de Vous sentir aussi maltraité par les âmes envers
lesquelles vous n’avez que de l'amour ! Quelle confusion ! Quelle
peur affreuse qui transformait votre Cœur et votre Corps en sang !
Pauvre de moi ! Qu’étais-je, moi, au milieu de ce Jardin, mon
Jésus ? Une petite boule, un instrumente inutile manœuvré par Vous.
Puis, s’en suivirent
les étapes de la Passion ; ici et là je m’évanouissais. Pendant la
flagellation, je l’avoue, mon Jésus, je n'ai jamais ressenti un tel
abandon du Ciel et de la terre. Ce n’était que colère effrénée dans
mon pauvre corps ; mon affliction avait atteint son comble ; ou
j‘était soulagée ou je mourais. J’ai alors ressenti un secours de la
terre et votre divine grâce est descendue sur moi : je me suis
reposée en Vous pendant quelques instants jusqu’au moment où j’ai
reçu la vie dont j’avais besoin. Mon âme s'est transformée, elle est
passée de la plus extrême douleur et agonie à la douceur et à la
paix.
Je me suis rendue
ensuite au couronnement d'épines. Je me suis sentie obligée de me
reposer auprès de la “Mãezinha” ; à ce moment-là j’ai senti, comme
d’autres fois encore, que mon Père spirituel, celui qui m’a été
enlevé, cherchait à me soulager. La “Mãezinha” (Petite Maman) m'a
prise dans ses bras, m'a couverte avec son manteau et m'embrassait,
et Vous aussi, mon Jésus, Vous m'embrassiez également. J’ai entendu
que Vous disiez à votre Mère :
― C'est ma fille et ta
fille, ma Mère, elle est la fille de nos amours.
J’ai poursuivi mon
chemin vers le calvaire ; à chaque pas que je faisais, c'était comme
un moment de moins dans ma vie : je la perdais rapidement. Il me
manquait l'aide du Ciel ; je n'avais pas de lumière qui me montrât
le chemin. C’est presque agonisante que j’ai été clouée sur la
croix. Les insultes sur le calvaire étouffaient mes gémissements :
on n'entendait que le bruit des gouttes de sang tombant sur le sol.
Les gémissements et les larmes de la Petite Maman se faisaient
sentir dans mon cœur. Au comble de mon agonie j’ai crié vers le Ciel
pour lui demander la cause d’un si grand abandon. Mon cri n'a pas
été entendu, il m'a semblé que personne ne l’entendait ; je devais
mourir seule.
Et maintenant, mon
Jésus, alors que déjà quelques heures de la nuit sont passées, ma
douleur ne cesse pas, mon agonie ne s’arrête pas, je sens se
prolonger mon abandon. Pardonnez-moi, mon Jésus, il me semble ne pas
croire en Vous. Les mots que vous m'avez dits ne semblaient pas
m’être adressés ; je suis une créature vile, je ne peux pas laisser
vos divins regards se poser sur moi. Ce que je suis, et qui je suis,
mon Jésus ! Pardonnez-moi, bénissez-moi, mon Jésus ; néanmoins je
désire Vous aimer.
7 mars 1942
Mon bon Jésus,
J’ai passé presque
toute la nuit à Vous tenir compagnie ; je n’ai pas perdu l’union
avec Vous. J’ai pleuré, car je ne pouvais pas cacher davantage ma
douleur ; mes larmes je vous les ai offertes. Les ténèbres ont
atteint la hauteur qui sépare la terre du ciel, elles m’ont caché le
bleu du firmament. Et moi si abandonnée, perdue dans l’obscurité :
ma douleur était mortelle. Avant même l’aurore Vous êtes venu dans
ma chambre, Vous êtes venu dans mon cœur. Je suis encore restée
quelques instants dans la même douleur ; ensuite, dans mon âme,
votre soleil divin a brillé, j’ai alors joui de votre douce paix et
entendu votre divine voix :
— Ma fille, ô ma
bien-aimée, mon amour te consume. En toi il n’y a que de l’or très
fin ; mon feu divin purifie tout en toi. Quelle richesse que celle
de ton cœur ! Je trouve en lui toute consolation et mes délices. Tu
m’as tout donné : j’ai tout reçu et gardé.
Je suis venu dans le
jardin de mon épouse, j’y ai cueilli beaucoup de fleurs ; j’ai gardé
tout leur parfum. C’est pour le distribuer aux âmes : c’est lui qui
les attire vers Moi.
Dis, ma petite folle, à
ton Père spirituel, qu’il l’est et le restera toujours ; je n’ai pas
consenti ni ne consentirai à ce qu'on te l'enlève ; dis-lui que je
lui envoie tout mon amour et l'amour de ma Mère bénie également.
Cela suffit, c’en est assez de l’expérience des hommes. Le coup qui
t’a été porté aurait pu être fatal si je ne veillais pas sur toi, si
je ne te soutenais pas et ne t’enveloppais de ma divine protection.
Je veux que bien vite, avec toute son attention, ton Père spirituel
veille sur ton âme.
Dis au Docteur Azevedo
que tout ce qu’il fait pour toi c’est à moi qu’il le fait et que par
toi je le reçois. La récompense est éternelle, je lui accorde tout
mon amour : il recevra tout par toi. Tous ses enfants restent sous
ma protection ; aucun d’eux ne se perdra ; tous auront dans le ciel
une place de prédilection. Je veux qu’il soit toujours, toujours
attentif à la plante que je lui ai confiée, car celle-ci ne pourrait
pas vivre sans ses soins. La fin approche rapidement, toute la
gloire et tout triomphe sont pour Jésus.
J’ai cessé de vous
entendre, mon Amour, et presque aussitôt mon cœur a commencé à
saigner de douleur. Toutefois, votre divine force m’a raffermie ; je
souffre mais j’ai davantage de vie. Je ne veux pas douter de vos
paroles, j’espère une résolution ferme, une transformation complète
des cœurs humains. Seul le pouvoir de Dieu peut renouveler tant
d’obstacles.
J’espère en Vous, mon
Jésus : ne me laissez pas mourir de faim, ne permettez pas que je
sombre dans l’abattement. Laissez-moi tout votre amour, toute votre
confiance, un grand désir de souffrir pour Vous.
Accordez-moi votre
bénédiction, mon Jésus,
je suis la pauvre
Alexandrina.
13 mars 1942
Jésus, je me vengerai,
et je me vengerai fortement de ceux que me font tant souffrir.
Savez-vous comment, mon Amour ? Par des prières plus ferventes, par
mes sacrifices afin qu’ils Vous connaissent et Vous aiment. S’ils
Vous aimaient comme vous le voulez, ils ne procéderaient pas de la
sorte. Pardonnez-leur, bon Jésus.
Tout ce qu’ils disent
sur moi, moi, sans Vous, sans votre grâce, je le serais et peut-être
encore davantage. Si Vous me laissiez seule ne fut-ce qu’un seul
instant, cela serait suffisant pour que je pratique de plus grands
crimes encore. Une seule chose me reste à faire : remercier ceux qui
m’humilient et me blessent. Ils m’ont ouvert un nouveau chemin afin
que je vous suive de plus près, avec davantage de perfection et
d’amour.
Je veux sourire à tout
et que ce sourire soit en premier lieu pour Vous. Mon pauvre cœur
est blessé, on ne cesse pas de le piétiner et à rouvrir toujours la
même plaie. Peu importe, car une seule chose m’intéresse : votre
amour ; celui-là me suffit ; celui-là je veux le posséder même si
pour cela je dois être piétinée et traitée par tous comme une
esclave.
À Vous, mon Jésus, je
me suis déjà offerte et je m’offre continuellement comme esclave. Je
baisse la tête pour recevoir de Vous le coup qui apporte toute la
douleur et le sacrifice. Au plus profond de mon cœur je répète
toujours : que votre volonté soit faite, Jésus, faites de moi ce que
vous voudrez.
Jésus, la soif et la
faim dessèchent mes lèvres et mon âme elle-même se meurt de soif. La
soif de mon corps c’est Vous qui permettez que je ne puisse pas la
satisfaire ;
je Vous offre ce sacrifice, je l’accepte par amour, afin que Vous
puissiez rassasier la soif de tous les cœurs.
La soif et la faim de
mon âme est causée par les hommes, ce sont eux qui me laissent
mourir : ils ne permettent pas que mon âme s’alimente et se rassasie
à la source que Vous avez choisie vous-même.
Ô mon Jésus, ô Jésus,
ayez pitié de moi, regardez mon âme qui ressemble à un petit oiseau
perdu et désemparé, qui faiblit.
Que serais-je sans
Vous ! Quel douleur, quelle souffrance, mon Jésus ! Quelles
ténèbres ! Quelle obscurité horrifiante ! Que de chemins si parsemés
d’épines! Aveuglée j’y tombe et m’y blesse, mon corps est meurtri de
coups et mon sang coule. C’est pour les âmes !
Vous placez devant moi,
devant mes yeux mon énorme croix ; je la vois clairement et sur elle
je suis continuellement clouée. Et maintenant, mon Jésus, à chaque
instant, mon agonie devient de plus en plus douloureuse. De temps à
autre, déjà presque sans vie, je laisse échapper un gémissement ;
mes yeux perdent leur éclat ; je meurs abandonnée, envahie par la
peur. La crucifixion approche ; soutenez-moi, veillez sur moi, mon
Jésus.
Après la crucifixion
Mon Jésus, lorsque les
moments de plus grande angoisse approchaient, avez-vous entendu, mon
Jésus, ma faible voix qui vous demandait de me ramener vers Vous,
car je n’en pouvais plus ? Pardonnez-moi, mon bon Jésus,
pardonnez-moi, mon Amour. C’est vrai que mon abattement était bien
grand et mon corps n’avait plus de force, il était incapable de se
mouvoir. Ma volonté voulait Vous suivre, celle-là était ferme, et
Vous êtes venu la soutenir, vous êtes venu me redonner vie, me
fortifier et alors, j’ai entendu votre douce voix :
― Ma fille, ma
bien-aimée, donne à ton Jésus l'aumône que bien peu de fois te sera
demandée.
Sans elle, les pécheurs, meurent de faim et tombent par milliers en
enfer. Sans elle, le Portugal n’aurait pas de paix et l’univers
entier ne recevra pas la paix désirée ; sans elle, mon divin Cœur
serait absent de beaucoup de cœurs, de beaucoup d’âmes.
Courage ! Ton Père
spirituel te soutient et te protège : Jésus et Marie te protègent
aussi.
J’ai cheminé vers
Gethsémani, toujours dans la tristesse, les ténèbres et la douleur.
Je vous ai senti, mon Jésus, revêtu de moi, appeler les âmes. Vous
leur parliez de l’agonie de votre Cœur, vous leurs montriez combien
il était blessé et blessé uniquement par amour. Quelle ingratitude !
Je sentais les âmes Vous tourner le dos, Vous mépriser. Pauvres âmes
qui ne veulent pas vous écouter ! Elles Vous fuyaient, comme folles,
allant à leur perte.
Les âmes allaient d’un
côté et le Père éternel de l’autre, en colère contre Vous, Jésus,
Vous laissant dans le plus grand abandon. Je ne pouvais presque plus
résister d’entendre votre douleur, votre amertume : même les pierres
semblaient s’en émouvoir. Je ne pouvais pas Vous voir fuir vers la
solitude, Vous mettre sous la terre, écrasé par un univers de
péchés. Je ne sais pas exprimer votre souffrance, mon Jésus ; je
n’ai pas de mots qui puissent expliquer l’infinité de votre Amour.
Je me suis relevée de
Gethsémani pour continuer d’être le même instrument en vos mains
divines, dans tout le parcours de votre Passion.
Mon abandon augmente de
crucifixion en crucifixion ; mais mon abattement est de plus en plus
grand. Je ne peux attendre l’aide du Ciel et, sur la terre on veut
me priver de tout. Ô mon Jésus, ô Jésus, à qui dois-je m’adresser ?
Ce n’est que par obéissance, si mal comprise pourtant, que je
résiste à cette marée de souffrances.
Lors de la
flagellation, je me suis reposée sur Vous, votre divin Cœur fut mon
abri, en lui j’ai reçu la vie qui était presque perdue. Protégée par
Vous, je regardais toutes les souffrances, mais pendant que je m’y
reposais, je ne les craignais pas. Votre divin abri me donnait
force, amenuisait ma douleur. Quand, sans état d’âme, on frappait ma
tête et on y plantait des épines très aigües, je me suis reposée
auprès de la si chère Mãezinha. Alors, comme le petit enfant qui
joue dans les bras de sa mère, je me lançais vers Elle, je
m’agrippais à son cou, je l’embrassais, je l’embrassais pendant
qu’Elle aussi me caressait.
Je regardais d’un côté
et de l’autre, de partout des souffrances arrivaient ; je savais
qu’elles étaient pour moi ; mon cœur souriait à tout cela et je
disais : je reçois tout cela par amour.
Ô mon Jésus, ce sont là
des épanchements et non point des consolations. Que votre Cœur
puisse avoir la consolation que j’aurais pu avoir ! Brillez dans les
âmes pendant que je souffre dans les ténèbres.
Je suis montée vers le
Calvaire, je suis allée vers la croix ; mon épuisement était mortel
et les insultes tombaient sur moi. Mon corps et mon âme étaient pris
par la peur et l’épouvante. Crier vers le Ciel ne servait à
rien. Mourir seule, mourir de douleur entre larmes et soupirs,
mourir pour donner vie, mourir pour que les ténèbres se transforment
en lumière, voila mes seuls désirs.
Ce martyre est terminé,
mon Jésus, et mon pauvre cœur n’a pas eu le moindre instant de
soulagement ; il continua de saigner : il ne pouvait pas s’attendre
à des horizons joyeux. Tout ou presque s’acharnait à creuser ma
tombe. Je regarde en arrière, je regarde devant, je ne vois personne
en ma faveur : tout est révolte, tout est mépris.
Ma vie avec ses
“illusions” continue.
Me redonneront-ils mon Père spirituel ? Viendra-t-il aujourd’hui?
Viendra-t-il demain? Mon Jésus, je n’ai commis aucun crime ; je
souffre innocente, je souffre par amour pour Vous, je souffre pour
Vous donner des âmes. Mieux vaut souffrir toute une vie innocente
que de souffrir un seul instant coupable !
Mon Jésus, les lettres
de mon Père spirituel m’ont été rendues. Pourquoi faire ? Le
sacrifice était fait ! Ce fut comme si on les avait placées sur un
cadavre qui ne ressent plus rien. L’obéissance le commande, je
l’accepte.
Accordez-moi votre
bénédiction et votre pardon.
La pauvre Alexandrina.
20 mars 1942
Jésus, je ne veux plus
vivre d’illusions ; je ne veux vivre que d’amour et de confiance.
Coupez en moi tout ce qui est terrestre, je ne veux espérer qu’en
Vous, je veux être forte, mais je n’y arrive pas, je me sens
défaillir chaque jour. Je sens dans mon âme que de nouvelles
attaques vont tomber sur moi. Toute est révolte ! Je prévois un
monde de lions qui se lanceront sur moi pleins de rage, pour me
dévorer. Quelle angoisse dans mon âme ! Quelle profonde tristesse
dans mon cœur ! Mon âme tremble de peur ainsi que tout mon corps ;
je ne peux pas vivre ainsi. Sera-ce parce que la fin est proche ?
Qu’elle vienne, qu’elle vienne vite ! Le Ciel est mon espérance. Je
veux, par tous les chemins parcourus durant ma vie, laisser, écrit
avec mon sang, votre amour. Ce sont des chemins de lutte, des
chemins de noires ténèbres ; ténèbres comme jamais, abandon dans
lequel je n’ai jamais imaginé me trouver. Je lève mes mains vers le
Ciel, vers le Ciel que si souvent j’ai fixé de mon regard et que
j’ai contemplé avec tant d’amour, mais je ne le vois pas. Je crie
avec force, du fond de mon cœur, mais mon cri ne monte pas, j’ai
comme l’impression que Jésus ne m’entends pas ! Abandon, abandon
complet !...
Jésus, Jésus, ayez
pitié de moi, j’ai comme le sentiment d’avoir perdu Vous et la
“Mãezinha”. D’aucuns ont éloigné de moi sur la terre, le soutient et
la lumière que Vous m’aviens donnés.
Jésus, Jésus, regardez
la petite folle perdue qui souffre et accepte tout par amour pour
Vous, pour Vous donner des âmes.
Jésus, “Mãezinha”, je
veux tout souffrir, mes les forces me manquent. Je suis toute seule
et je peux dire avec Vous : “Père, pourquoi m’as-tu abandonné ?
Vous désirez me faire
ressembler à Vous ? Merci, mon Jésus. Je me soumets au poids de
votre Croix. Je sens que l’on m’arrache le cœur, je me sens mourir
écrasée, mais je veux pouvoir balbutier toujours : Oh ! combien il
est doux de mourir d’amour ! Oh ! comme il est bon d’accomplir la
volonté du Seigneur!
Jésus, au fur et à
mesure que la crucifixion approche, la peur augmente, je me sens
clouée sur la croix, exhalant, de loin en loin un soupir, jusqu’à ce
que ce soit le dernier.
L’agonie augmente : de
mauvais traitements sans ka moindre pitié sont donnés à mon corps.
Ô monde, ô monde, tu ne
connais ni la douleur ni l’amour de Jésus. Avec lui seul on peut
embrasser la croix, avec lui seul on peu cheminer vers le martyre !
L’heure de la
crucifixion est arrivée : je n’aurais pas pu la craindre davantage.
Mon corps n’avais plus de force ; j’ai perdu toute l’aide que le
Ciel m’avait accordée. Merci, mon Amour, Vous êtes venu Vous-même me
réconforter.
— Ma fille, écoute :
c’est Jésus qui s’approche, viens boire à ta source, viens rassasier
ta faim par ton obole. C’est par ta crucifixion que le monde reçoit
la paix. Courage ! Ton Père spirituel t’aide de loin comme s’il
était là. Je ne l’ai pas enlevé d’auprès de toi. Moi et ta
“Mãezinha” nous l’accompagnons et soutenons afin qu’il te vienne en
aide. Courage ! Courage !
J’ai cheminé vers le
Jardin des Oliviers, avec vos divines paroles, pendant un certain
temps gravées dans mon cœur. Peu à peu, à cause des ténèbres, je ne
voyais plus rien : mon affaiblissement m’handicapait. Je souffrais
comme si je ne Vous avais jamais entendu ni rencontré. Quel triste
abandon ! J’ai alors commencé à sentir les coups de lance dans mon
cœur, qui à cause de cela semblait sortir de ma poitrine, et tomber
à terre où il était alors écrasé, maltraité. Ce n’était pas le mien,
mais le vôtre, mon Jésus. Quelle douleur pour moi de Vous voir
souffrir ainsi, Vous qui vouliez couvrir toute la terre, alors
qu’elle-même était le voile qui couvrait les péchés dont Vous étiez
recouvert. Impossible ! Vous ne pouviez pas Vous cacher au regard de
votre Père Éternel. Il Vous voyait tout recouvert du péché des
hommes et se révoltait contre Vous. J’entendais ses soupirs ainsi
que Vos larmes. Vous n’aviez personne qui puisse témoigner de Vos
souffrances ; les apôtres dormaient ; préoccupés de rien, ils ne
voyaient même pas que Vous suiez du sang. Ce ne fut que Vous Vous
êtes levé pour les appeler qu’ils on remarqué Vos habits
ensanglantés. Sem bien comprendre ils se sont rendormis. Pauvre
Jésus ! Vous souffriez seul. Quelle leçon pour moi!
Dans le palais d’Hérode
j’ai senti sur mes épaules la cape de roi et sur la tête la
couronne ; j’ai senti dans mon cœur votre douleur pour tout ce que
l’on Vous faisait souffrir. Lors de la flagellation je suis allée me
reposer dans votre divin Cœur. Il était grand comme l’Univers,
j’aurais pu le parcourir en entier, mais non, j’étais très blessée ;
je me suis appuyé sur Vous, et je me suis reposée jusqu’au retour
des bourreaux.
Lors du couronnement
d’épines, je me suis reposée dans les bras de la “Mãezinha” et j’ai
senti que son manteau me couvrait et que sa très sainte Main me
caressait : si visage contre le mien apaisait ma douleur. Je me
sentais fatiguée, sans joie. Dans ses bras, personne ne venait me
blesser, mais quand j’y suis arrivée, j’étais déjà en sang.
J’ai cheminé vers le
calvaire, je sentais qu’il me serait impossible d’arriver en haut ;
la vie me quittait, la force m’abandonnait. J’ai invoqué la
“Mãezinha”, j’ai votre son divin Nom, mon Jésus, j’ai demandé votre
divine force. J’ai entendu qui Vous me disiez :
— Je remplirai de ma
divine force le Cyrénéen qu’avec tant d’amour m’accompagne sur le
Chemin du Calvaire, ainsi que le Cyrénéen que le premier j’ai choisi
pour toi. De loin il t’aide comme s’il était là. Grande sera la
récompense, on entendra, pendant des siècles, parler de lui et de
tous ceux qui t’accompagnent dans ta douleur et te la rendent plus
suave.
Je suis arrivée au
calvaire. Je sentais à mes pieds, là où j’étais crucifiée et
quelqu’un d’autre dans mon cœur. Sur le calvaire il n’y régnait
qu’obscurité et abandon total. Au milieu des blasphèmes j’entendais
aussi des soupirs ; des larmes d’amertume et de douleur tombaient
abondantes. De tout mon cœur j’ai crié vers le Ciel ; il était fermé
et ne s’ouvrait pas pour moi. Oh ! douleur ! Oh ! douleur! Oh!
Abandon, je ne t’accepte que par amour!
La passion se termina,
malgré cela, la souffrance, elle, doit atteindre son apogée. J’ai su
que j’avais raison de ressentir de nouveaux assauts dans mon âme.
Quel dommage, mon Jésus, que l’on ne connaisse pas la valeur de
l’obéissance et de tout ce que Vous opérez dans les âmes ! Mon cœur
semble éclater de douleur. Les humiliations me font trébucher. Être
forte, avec Vous seul, Jésus. Que dois-je faire vis-à-vis de ceux
qui me font souffrir ? Accepte, Jésus, le dégoût que j’ai, dégoût
qui ne me permets pas de rassasier la soif de mes lèvres, afin
qu’ils n’éprouvent pas de dégout envers Vous revêtu dans les âmes,
afin qu’ils Vous aiment et connaissent Vos vérités. Donnez-leur
tout, mon Jésus, car j’offre tout pour eux.
Pardonnez-moi, Jésus.
Accordez-moi votre bénédiction, votre grâce et votre Amour.
27 mars 1942
Jésus, écoutez mes
paroles. On dirait que celles-ci sont étouffées par le poids de la
mort. Je veux vous dire une fois encore : “Je suis vôtre dans le
temps et je serai vôtre dans l’éternité. A vous seul je me donne, je
ne veux appartenir qu’à vous”. C’est avec l’âme en agonie et le
cœur écrasé par la douleur que mes lèvres balbutient ces paroles:
“uniquement par amour”.
Les noires ténèbres ne
me laissent pas voir ; seul le sang je sens couler de mon pauvre
corps. Je me sens seule : on m’a volé le réconfort, le soulagement
de l’âme, mon soutien sur la terre. Il faut que je lutte toute seule
lors du combat le plus difficile. Parfois je ne peux pas résister à
la nostalgie de voir célébrer dans ma chambre le Saint sacrifice de
la Messe. Tout m’a été volé, tout est perdu ! Pardonnez, mon Jésus,
à ceux qui ont été la cause de tout cela : pour tous je demande
votre compassion et votre lumière pour leur aveuglement.
Au milieu de cette mer
de souffrance, dans cette lutte contre de noires ténèbres, dans
cette nuit très opaque, mon âme jouit de la plus grande paix ; je ne
crains pas de comparaître en votre divine présence. Quelquefois il
me vient à l’esprit si cela ne serait pas de l’orgueil. Que jamais
je ne le connaisse. Serait-il né de mon ignorance ? Vous m’avez
accordé la grâce de connaître l’abîme de ma misère, mais en même
temps je vois très bien, je vois très clairement que l’abîme de
votre amour et de votre miséricorde est infiniment plus grand. Je
confie aveuglément en vous et j’espère en vous.
Ô mon Jésus, c’est le
boiteux infernal qui cherche à m’importuner, à éloigner de moi la
paix de ma conscience, à m’attacher par quelque lien aux choses de
la terre. Quand je me sens davantage détachée du monde et dans le
plus grand désir de m’envoler vers vous, vers la Patrie céleste qui
m’attend, c’est alors qu’apparaissent dans mon imagination toutes
ces choses qui me tourmentent : “T’es pressée de quitter les tiens,
que tu ne reverras plus jamais ; avec la mort tout fini, il n’y a ni
ciel ni enfer”.
Jésus, ô Jésus, je Vous
aime, je crois en Vous ; Vous ne trompez personne : ne laissez pas
le maudit me confondre. J’aurais aimé que ces paroles ne soient pas
connues ; je ne veux scandaliser personne, je ne veux pas éteindre
la foi à ceux qui n’en ont que peu ni précipiter dans l’erreur ceux
qui n’en ont pas du tout. Pardonnez-moi, si ne devais pas le dire.
Mon bon Jésus, mon doux Jésus, j’ai pleuré et j’appréhende ma
crucifixion. Oh ! pauvre de moi, pauvre de moi sans Vous ! Ne me
manquez jamais, accordez-moi toujours votre divine grâce : je n’ai
plus de force et ma vie est perdue.
Pendant la nuit et dans
la matinée d’aujourd’hui, votre divine présence m’a réconfortée.
Vous Vous êtes présenté devant moi, la croix sur les épaules, plié à
terre, fatigué et presque sans vie et entouré de vil canaille.
Voyant un Dieu souffrir de la sorte par amour pour moi, je ne peux
pas Vous refuser ma crucifixion ; je l’accepte par amour pour Vous,
je l’accepte pour les âmes. Revêtez-Vous de moi, vivez en moi,
faites se mouvoir mon corps sans vie. La crucifixion est proche : ne
m’abandonnez pas, mon Jésus, donnez-moi grâce, force et amour.
Après la crucifixion
Jésus, que votre force
ne me manque pas afin que je puisse décrire le mieux que je pourrai
ce que Vous avez souffert lors de votre sainte Passion ainsi que
votre protection et votre amour envers la pauvrette que je suis.
C’est pour votre plus grande gloire et le profit des âmes.
Les yeux de mon corps
semblaient presque ne plus voir à l’approche du moment de la
crucifixion. Ma faiblesse m’affligeait ; l’abandon où je me sentais
me menait au tombeau. Quel tourment ! Ne pas avoir de vie et devoir
lutter contre le monde. Votre vie et votre amour sont descendus en
moi et j’ai alors entendu votre douce et tendre voix :
— Ma fille, ô amour de
ton Jésus, courage, ne crains pas, ne crains rien. Le chemin du
Calvaire va bientôt finir : viens piétiner les dernières épines. Les
blessures qu’elles causent sont des sources de salut. Les âmes ont
besoin de tout. Jésus se console dans ta crucifixion, Il trouve en
toi la réparation que l’on peut trouver sur la terre. Courage !
Jésus et la “Mãezinha” ne t’abandonneront pas. Ton Père spirituel
t’accompagne en esprit avec ma grâce, il est en union avec nous et
t’encourage.
Je suis allée à
Gethsémani : au plus fort de mon abandon je me rappelais vos douces
paroles qui pendant un certain temps sont restées gravées dans mon
cœur. Après, après les coups qu’il a reçus, à cause des mauvais
traitements dont j’ai été victime de la part de l’humanité, tout est
disparu. Et alors là, toute seule, dans un silence profond, dans la
plus grands obscurité, presque morte, je cherchais à me cacher pour
toujours, que la terre soit ma cachette, afin de ne pas entendre les
remontrances du Père Éternel.
Mon Dieu, mon Dieu ! Et
moi toute seule ! Aucun souffle de vent n’était perceptible ; même
les feuilles des oliviers ne bougeaient pas sauf les branches qui
semblaient se plier vers la terre en signe d’adoration. Oh !
douleur, ô agonie de Jésus, ô folie d’amour de Jésus pour les âmes !
Ce n’étaient pas mes souffrances, mais les vôtres, uniquement les
vôtres, mon Jésus.
J’ai poursuivi mon
chemin : ça et là je succombais et tombais, écrasée par la
souffrance. Plusieurs fois j’ai invoqué le Nom de Jésus et celui de
la “Mãezinha” ; je vous ai demandé de m’accorder des forces, car les
miennes étaient perdues. Merci, mon Jésus : avec Vous j’ai pu
résister.
Lors de la
flagellation, étant recueillie dans votre divin Cœur, je voyais
devant moi les bourreaux préparés pour punir mon corps. Recouverte
par votre divin Amour, je ne les craignais pas. Et lors du
couronnement d’épines, quand j’étais dans les bras de la “Mãezinha”,
je voyais également devant moi d’aiguës épines être préparées en
forme de casque pour ceindre ma tête. Les caresses de la “Mãezinha”
m’ont fait oublier qu’elles étaient préparées pour moi. Oh ! Jésus,
combien grands sont votre pouvoir et votre amour !
J’ai cheminé sans vie
vers le calvaire et j’ai crains de ne pas y parvenir ; je pouvais à
peine marcher, les forces me manquaient. Lors de la seconde chute,
l’obéissance m’obligea à entrer de nouveau dans votre divin Cœur ;
j’ai alors entendu que Vous me disiez :
— Ma fille, toutes mes
grâces et tout mon amour se déversent sur le Cyrénéen qui t’aide
et sur tous ses descendants jusqu’à la fin, et sur ton Père
spirituel ici présent à tes côtés et sur les âmes qui de plus près
t’aident, et qu’avec amour te choient, rendant plus suave ta
douleur. Cela ne peu pas s’appeler amour terrestre !
J’ai été clouée à la
croix. Á chaque coup que l’on donnait sur les clous, je défaillais.
Le calvaire n’était qu’obscurité, on entendait à peine les soupirs
de la “Mãezinha” : ils étaient étouffés par les blasphèmes ; je les
sentais davantage dans mon cœur. Je croyais bientôt expirer en Vous
mais que Vous me disiez que je n’expirerais pas avant d’avoir revu
mon Père spirituel.
Oh ! mon Jésus, cette
lumière que Vous m’avez donnée m’oblige à confier davantage en Vous.
Il est vrai que je n’ai jamais vécu un tel abandon, que je n’ai
jamais été blessée aussi cruellement, mais cet état, au lieu
d’étouffer ma foi, ma confiance et mon amour envers Vous, me
rapproche encore davantage à Vous. Tout m’invite à Vous aimer, tout
me pousse à Vous demander pardon pour ceux qui me font souffrir.
Pardonnez-leur, Jésus, et donnez-moi mon Père spirituel au moins à
l’heure de ma mort, afin que pour la dernière fois je puisse lui
ouvrir mon âme. J’ai confiance en Vous, Jésus, je sais que Vous
accéderez à ma demande et que Vous accomplissez toujours vos
promesses.
Pardonnez-moi, Jésus ;
accordez-moi votre bénédiction.
3 avril 1942
Vendredi-Saint, à
11h30.
― “Ne crains pas, ma
fille, tu ne seras plus crucifiée ! La crucifixion à laquelle tu as
été soumise est la plus douloureuse que l’on puisse imaginer dans
l’histoire des âmes. Je vais te prendre avec moi au Paradis ; tu y
monteras tout droit, accompagnée de ta Mère bien-aimée.
Dis à ton Père
spirituel : aussitôt après ta mort je vais accorder la paix au monde
comme signe que je désire sa consécration à ma Mère bien-aimée, si
souvent demandée par toi. Mais il faut qu’avant cela mes desseins
s’accomplissent, ainsi que ma divine promesse”.
Le Samedi-Saint
après avoir communié, à 18 heures, Notre Seigneur lui dit encore :
― “Courage, ma
fille ; Jésus est avec toi et Il le sera jusqu’à la fin. Tu as
toujours été fidèle à accueillir mes grâces et mon amour ! Je serai
fidèle à mon tour en les distribuant et en accordant mon amour en
abondance. J’aime ton Père spirituel, j’aime ton médecin que te suit
avec tant d’amour.
Courage ! Ce n’est que
pour peu de temps ! La bataille ne durera pas longtemps. Ta
“Mãezinha” bien-aimée viendra à ta rencontre et te conduira au
Paradis, comme Elle viendra à la rencontre de ton Père spirituel et
de ton médecin et les accompagnera également au Paradis. C’est le
prix, c’est la récompense que je leur accorde”.
Depuis le
Vendredi-Saint j’ai commencé à me sentir morte sur le calvaire au
milieu des plus denses ténèbres et dans un grand abandon. Tous les
lions se sont acharnés sur moi. Mon corps n’a pas eu de sépulture ;
les oiseaux de nuit, malgré les noires et denses ténèbres, venaient
manger mon cadavre. Je suis restée longtemps dans cette souffrance
et maintenant encore je sens ces oiseaux enfoncer leur bec dans mes
os, les réduisant en cendres.
La croix où j’ai été
clouée est tombée à terre, mais je sens encore qu’une partie de mon
corps reste prisonnier des clous. Ces oiseaux ont encore beaucoup à
becqueter dans mon corps qui n’a aucune vie sur terre, seul mon cœur
semble avoir vie, mais une vie qui n’est pas humaine, c’est la vie
divine et cette vie divine lui procure du sang et je sens que
l’humanité entière vient boire à cette vie divine, comme des petits
oiseaux. Je sais maintenant que ce ne sera que quand ces oiseaux
nocturnes auront réduit mon corps en cendres que je pourrai partir.
Je ne me sens plus sur
la croix : c’est toujours cette souffrance que je viens de décrire.
Mais celle-ci n’est pas moins douloureuse.
Je sens les lions qui
profitent autant qu’ils peuvent de cette chair, mais cette chair
pourrit déjà, elle est puante, et ces oiseaux, enfoncent leurs longs
becs dans les os et les taraudent. Vous ne pouvez pas comprendre
combien je souffre : moi-même je ne sais l’expliquer.
Ma pauvre âme est
restée au milieu de la montagne, exposée à la plus grande tempête,
une noire tempête, très triste et très aride ; je reste là,
tout-à-fait abandonnée. Tous les lions se sont précipités sur moi !
Combien triste est l’ingratitude des hommes !
Le jour où mon Père
spirituel est venu, mon âme se sentait réconfortée, mais dès qu’il
prit congé, je me suis sentie oubliée de lui et privée de la Sainte
Messe que j’avais tant désirée. On ne me l’a pas redonné ni même
prêté, mon Père spirituel : il est venu comme un fugitif.
Tout cet état d’esprit
meurt avec moi sur le calvaire, sauf quand Notre-Seigneur me
réconforte miraculeusement, et cela arrive quelquefois dans la
journée.
Du 13 au 14 avril,
pendant la nuit, j’ai senti la présence de mon Ange gardien. Il
voulait me soulager, soulever mon corps pour amenuiser ma grande
souffrance.
Du 14 au 15 avril, le
démon aussi est passé par là. Je voyais son ombre qui montait et
descendait devant moi.
Le 16, aujourd’hui, je
sens que les oiseaux sont descendus vers le ventre, alors qu’en haut
ils avaient bien davantage à becqueter. Maintenant je me rends
compte que ces oiseaux s’occupent de mon tronc qui est transformé en
cendres et ils les remuent espérant y trouver encore quelque chose à
picorer. Mais comme ils n’y trouvent plus rien, ils descendent vers
mon ventre où beaucoup d’autres s’y trouvent déjà et y enfoncent
leurs longs becs jusqu’à cacher leur tête.
La peur que j’avais de
la crucifixion s’est transformée en nostalgie. Combien n’a-t-il pas
été douloureux pour Jésus d’avoir Son corps cloué à la croix, alors
qu’il m’est si douloureux d’avoir le mien posé sur un lit !
Quelqu’un lui dit :
“Notre-Seigneur n’est resté en croix que trois heures, alors que
toi, tu y est depuis bien plus longtemps”. Alexandrina répondit :
“Notre-Seigneur avait son corps tout lacéré alors que le mien ne
l’est pas”.
J’ai une telle
nostalgie de la crucifixion que je me dis que l’on ne peut apprécier
quelque chose que quand on la perd. Si je l’avais maintenant, je
l’accepterais dans un éternel enlacement, me disant que plus jamais
je ne desserrerait mes bras et que je resterais ainsi pour
l’éternité. Je me dis encore que si c’était maintenant, combien
j’aimerais la passion et les tourments permis par Notre-Seigneur !
Je me disais encore que je ferais chercher les vêtements de la
crucifixion pour les voir, les embrasser et les serrer dans mes
bras. Voyant le tapis sur lequel je vivais la passion, j’ai dit :
“Laissez-moi embrasser ce tapis !”
Et elle l’embrassa.
Dans la nuit du 19 au
20 avril, la “Mãezinha” est venue deux fois près de moi et à deux
reprises Elle m’a caressée.
Quand on a demandé à
Alexandrina si la Vierge était belle, elle dit : “Oh ! comme Elle
était belle ! Belle ! Très belle ! Pourquoi je ne devrais pas avoir
envie d’aller au Ciel afin de la voir pour toujours ?”
“Comment était-Elle
vêtue ?” — “Elle n’était que lumière, lumière, la clarté la plus
brillante ; elle portait des manteaux de couleurs”.
Je n’ai jamais pensé
que l’on puisse avoir autant d’affliction dans l’âme. Cela serait
suffisant pour m’ôter la vie, si Jésus ne me soutenait pas.
J’avais dans l’idée que
mon Père spirituel souffrait beaucoup, et je ne me suis pas trompée.
Peu de temps après j’ai su ce qu’il en était. Mes souffrances ont
redoublé. Cette vie divine que je sens soutenir mon cœur le pousse
vers le haut, toujours plus haut, afin qu’il reçoive les derniers
coups. Mon cœur est blessé de tous côtés ; il est transpercé dans
tous les sens.
Les oiseaux ont déjà
mangé presque tout mon ventre ; ils s’attaquent maintenant à mes
reins. Mon corps n’a presque plus de cendres. On m’a placée sur une
haute montagne et les vents ont éparpillé mes cendres et ce fut dans
la plus grande obscurité que j’ai entendu une sonnerie pour
rassembler tous ces oiseaux qui, comme un seul, se sont posés sur
mon corps. Ils s’attaquent à mes hanches. Je peux dire : “Mon âme
est triste à en mourir, si triste que rien au monde ne pourrait la
réjouir”. La croix où j’ai été crucifiée n’existe pas ; même mes
pieds ne semblent plus attachés par les clous.
Je sens mon âme comme
si c’était un corps cloué pieds et mains, mais elle est plongée dans
l’obscurité ; aucune lueur, même infime, n’y peut pénétrer, ni non
plus le moindre courant d’air. Le Ciel et la terre m’ont
abandonnée : même mes cendres ne sont pas respectées. Ce sont là les
sentiments de mon âme.
Hier, quand j’ai reçu
l’ordre du Prélat pour être emmenée à Coimbra pour être observée par
le Professeur Elísio de Moura, j’ai eu cette pensée : “Combien ma
souffrance est mal comprise ! Je suis certaine que s’ils
ressentaient, rien qu’un instant, ce qui se passe dans mon corps,
personne au monde n’oserait me proposer un tel déplacement”.
Les yeux tournés vers
le Ciel, j’ai pu dire : que tout cela soit pour l’amour de Jésus.
Lui, il est digne de tout. Le salut des âmes mérite ces souffrances,
car elles sont le prix du Sang de Jésus.
L’agonie de mon âme se
prolonge, elle s’aggrave de plus en plus. Seul le Ciel peut mettre
un terme à tout cela. Que Jésus accepte toutes ces souffrances et
soit avec moi, car ce n’est qu’avec Son aide que je peux vaincre.
Quelle amertume, quel
tourment de ne pas avoir mon Père spirituel pour me réconforter : il
était ma lumière !
Le 27 avril 1942
J’ai demandé à Jésus
avec beaucoup de confiance de mourir le premier vendredi du mois de
mai, afin de pouvoir passer le premier samedi du mois au Ciel. Ayant
appris tout ce que souffrait mon Père spirituel, pour justifier de
son innocence, je me suis offerte à Jésus en Lui disant que si
c’était Sa divine volonté, que je souffre encore treize jours et
qu’ensuite Il m’appelle au Ciel pour y fêter Son Ascension ;
j’aurais ainsi un peu plus de temps à souffrir, et Lui pour
satisfaire mes demandes.
En ce même jour
Notre-Seigneur m’a dit :
― “Ma fille, dis à
ton Père spirituel qu’il me fasse entièrement confiance. Mon divin
Cœur est tout-puissant. Je suis vainqueur et je triomphe avec lui.
Je l’aime et il ne m’a jamais offensé”.
Un peu plus tard, Jésus
est revenu et m’a dit :
― “Dis au Père
Frutuoso de dire à ton Père spirituel que j’accorde à ma petite
fille tout ce qu’elle me demande et qu’il n’oublie jamais que j’ai
tout pouvoir au Ciel et sur la terre”.
2 mai
1942 – Premier samedi du mois.
— “Bienheureux les
humbles et les persécutés pour l’amour de Jésus ! Ceux-là sont les
élus du Seigneur et les aimés de son divin Cœur.
La mission de la
crucifiée de Jésus sur la terre est presque terminée. Jésus lui
donnera la mort la plus touchante, la plus remplie d’amour. Jésus
viendra, Marie viendra, ainsi que Joseph et la Trinité Sainte. Les
Anges viendront, ainsi que tous les Saints, pour conduire au Paradis
celle qui a tant aimé Jésus sur la terre. Le ciel descendra dans la
petite chambre de l’héroïne de Jésus.
Quelle gloire pour le
Portugal et pour le monde entier ! Quelle fête et quel triomphe au
Paradis !
Dis, ma fille, dis à
ton Père spirituel que je l’aime, qu’il est enfant de prédilection
de ma Compagnie. Plus ils le font souffrir, plus mon divin amour
brille en lui. Jésus va conduire à son divin Cœur la brebis égarée ;
Jésus ne tardera pas. Le Ciel est à lui, la couronne lui est déjà
préparée. C’est un e couronne d’épines, parsemée de pierres les plus
précieuses.
Dis, ma fille, dis au
Docteur que le prix que dans le Ciel lui est préparé est le plus
grand que l’on puisse accorder à la médecine. Le Cœur de Jésus est
ravi des soins et attentions délicates qu’il a eu envers la
crucifiée de Jésus. Il se rendra compte sur la terre encore de la
continuelle protection de la rédemptrice de l’humanité.
Dis, ma fille, dis à ta
sœur et à Sãozinha, qu’elles sont sous la protection de Jésus,
enfermées pour toujours dans son divin Cœur. Jésus sera la
récompense, le prix pour tous ceux qui souffrent avec sa benjamine.
Jésus est tout pour les âmes qui l’aiment et qu’en retour elles sont
par Lui aimées.”
― Merci, merci, mon
Jésus. Récompensez-les tous pour moi, accordez-leur votre divin
amour et permettez que du Ciel je puisse les réconforter tous et les
assister dans leurs nécessités.
Ô mon Jésus, je
reconnais que c’est Vous; je ne peux pas me séparer de votre divine
présence. Combien j’aimerais aller au Ciel tout de suite !
— “Encore un peu et ce
jour arrivera !”
― Merci, mon Jésus.
3 mai
Mon Dieu! Mon Dieu! Le
cri agonisant de mon âme se perd dans la montagne et n’est pas
écouté ni sur la terre ni au Ciel. Ceci je le dis souvent par la
pensée, pendant que je sens les oiseaux dévorer mes cuisses et que
l’agonie de mon âme, agonie que l’on ne peut expliquer, mais qui
augmente que je prends connaissance de toutes les avanies que l’on
disait sur moi. Il me semblait que cela continuerait après ma mort,
causant ainsi de la peine à mes chers familiers. Mon désir serait
que toutes ses vexations meurent avec moi
Du 4 au 5 mai
Pendant la nuit, la
Mãezinha, toute belle, est venue plusieurs fois se placer face à
moi, tout près de mon oreiller, soulageant ainsi ma souffrance.
Pendant la même nuit,
mon Ange gardien s’est penché sur moi et de ses ailes cherchait à
soulager mon corps.
6 mai
Ô ténèbres, ô ténèbres
épaisses et affligeantes ! Ô Ciel, ô Ciel, donne-moi ta lumière !
Mon cœur est tellement
blessé que l’on dirait qu’il n’a même plus la forme d’un cœur
humain. Toutefois, il est comme une source abondante de sang. C’est
la vie divine qui le fait ruisseler. Je sens que toute l’humanité y
boit avidement, de peur que le sang cesse de couler.
L’état de mon âme s’est
ainsi aggravé depuis que j’ai appris combien on fait souffrir mon
Père spirituel ; mais cela n’ébranle pas ma confiance en Jésus et je
suis sûre qu’Il fera rejaillir son innocence.
Maintenant je sens que
les oiseaux nocturnes arrivent jusqu’à mes genoux pour y manger.
Tout mon corps ne sera bientôt qu’un amas de cendres. Jésus ne
viendra-t-il pas alors me chercher ?
7 mai
L’âme affligée, je répétais :
― Combien je suis
triste et combien sont amères les derniers jours de ma vieq! De mon
amertume tirez, o Jésus, douceur et joie pour vous et bénéfice pour
les âmes.
8 mai
Je n’en pouvais plus à
cause du poids des humiliations, à cause de mon agonie et des
ténèbres épaisses que je sentais dans mon âme, car tout cela
semblait m’étouffer en moi la confiance que j’ai en Jésus, je disais
alors :
Si ceux qui m’ont
enlevé mon Père spirituel expérimentaient ce que c’est que de
souffrir, ils me le rendraient de suite, pour mon confort.
Et tout bas, comme en
secret, je disais à Jésus : Je Vous jure que j’ai confiance en
Vous !
Et, pensant tout d’un
coup que je n’avais plus la crucifixion, j’ai ressenti une telle
douleur en mon cœur qu’il me semblait pleurer des larmes de sang et,
je me disais que si j’avais pu être de nouveau crucifiée, cela
serait suffisant pour soulager la souffrance de mon âme !
Quelle nostalgie, mon
Jésus, quelle envie d’être à nouveau crucifiée !
Maintenant les oiseaux
de nuit sont tout près de mes genoux : je sens mon cœur défaillir et
perdre la vie divine. Je marche lentement. Tout disparaît en moi.
Je sens aussi que
l’humanité ne bois plus avec le même entrain, car le sang, mon sang,
se raréfie également.
Le manchot se dépense
follement dans mon imagination, pour me suggérer de m’attacher aux
choses du monde ; mais plus il se dépense à cette tâche, plus Notre
Seigneur m’élève vers Lui.
12 mai
Aujourd’hui la vie
divine de mon cœur je la compare à une faible lampe qui à chaque
instant menace de d’éteindre. Le sang ne coule plus sinon de temps à
autre une toute petite goutte que l’on peut à peine boire. Je disais
aujourd’hui à Notre Seigneur :
Mon Jésus, Mãezinha,
regardez l’aridité de mon âme, regardez l’abandon dans lequel elle
se trouve de la part du Ciel et de la terre ! Jetez sur moi vos
divins regards de compassion ! Venez à mon secours, venez, ne me
laissez par mourir d’effroi au milieu des ténèbres ! Mon âme est
toute intimidée à cause des assauts du démon. Il veut m’accuser et
me lancer à la face tout ce qu’il y a de pire, me présentant ma vie
toute remplie de tromperies.
Jésus ne me laisse pas
longtemps me battre avec mes doutes, mais le diable, enragé, me
cause une grande peur. Si je pouvais avoir un prêtre toujours à côté
de moi ! C’est mon Père spirituel que je veux, car c’est lui que
Jésus m’a promis et que les hommes m’ont enlevé.
Les oiseux de nuit
s’attaquent maintenant à mes pieds, mais ils sont de mauvaise humeur
car ils y trouvent peu à manger. Ils picorent et picorent encore
dans le peu de cendres qui restent. Ô le jour de ma mort sera le
jour le plus heureux de ma vie !
14 mai – Jour de
l’Ascension
J’aurais bien aimé
expliquer combien mon âme souffre, mais je n’ai fait qu’essayer, car
je n’y parviens pas, je ne sais l’expliquer. Que d’horribles
souffrances se sont abattues sur moi ! Je n’ai jamais pensé pouvoir
souffrir autant ! Aujourd’hui je me sens un peu mieux, et ma
confiance en Jésus et Marie redouble, car il me faut des forces pour
combattre l’enfer qui semble se déchaîner contre moi.
Mon cœur continue comme
une lampe affaiblie. De loin en loin il laisse s’échapper une petite
goutte de sang que l’humanité vient aussitôt laper. Chacune de ses
gouttes semble être la dernière. Je sens que mon cœur n’est attaché
à la vie divine que par un fil très mince qui à la moindre tension
peut casser.
Je ne sens plus les
oiseaux de nuit sur mon corps ; il me semble qu’il ne reste plus en
lui le moindre vestige de cendre.
Je sens également que
Celui qui maintient mon cœur en vie c’est Jésus, Jésus seul, et il
me semble que je ne suis reliée à la Patrie céleste que par ce mince
fil.
Vive Jésus ! Vive
Marie ! Vive la très Sainte Trinité que j’aime à la folie!
24 mai
Jésus a suspendu ma
crucifixion: j’ai l’impression qu’il a suspendu ma vie. Lui seul
peut évaluer ma tristesse et ma nostalgie. Je n’ai pas la souffrance
de la croix ; je ne m’y sens plus clouée ; elle s’est complètement
cachée à moi, mais j’ai une croix plus grande encore, mais
souffrances sont bien plus grandes.
Je ne puis vivre dans
le monde. Le temps ne passe pas, les heures me semblent des siècles,
les jours et les nuits des éternités. Combien de fois je lève les
yeux vers le Ciel pour m’exclamer :
Jésus, ô mon bien-aimé
et tendre Jésus ! Mãezinha, ô ma bien-aimée et tendre Mãezinha ! Ô
Trinité Sainte, ô ma bien-aimée et tendre Trinité je ne veux vivre
que pour Vous, je m’offre toute entière à Vous, je ne veux aimer que
Vous !
Pauvre de moi ! Je dis
que j’aime alors que je n’ai plus de cœur pour aimer ; je n’ai de
corps que pour la souffrance ; je suis comme une boule de savon qui
au moindre courent d’air éclate. Que de ténèbres, mon Jésus, que de
sécheresse, que d’angoisses dans mon âme !
Le mince fil de la vie
divine qui attachait mon cœur, même si je ne le sens plus, je sais
qu’il est toujours là. Je sens également qu’à chaque instant il
menace de se rompre. La furie de la terrible tempête le pousse dans
tous les sens. De l’endroit qu’occupait mon cœur, sortent de temps à
autre quelques rares gouttes de sang. Je comprends, maintenant,
combien l’humanité en a besoin : avec quelle frénésie elle vient
avaler ces quelques gouttes !
Ô mon Jésus,
n’abandonnez pas la pauvrette qui a toujours, et maintenant encore,
confié en Vous. Même si je sens, au milieu des ténèbres, que tout
semble perdu, je n’espère qu’en Vous seul.
Le démon a cassé toutes
les chaînes qui le tenaient, et il est tombé sur moi. Je lute seule,
seule je combats sa rage.
Mon Jésus, à chaque
instant je crois Vous offenser ! Ô mon bien-aimé Jésus, ma chère
Petite-Maman, je suis privée de mon Père spirituel, justement en ces
jours où j’en ai le plus besoin !
Je me sens abandonnée
de tous, excepté quand, miraculeusement, même si peu souvent, vous
me donnez pour le réconfort de mon âme.
Pardonnez à ceux qui me blessent ; pardonnez leur cécité ; car
moi-même je leur pardonne.
Dans mon cœur il n’y a
plus de place pour d’autres épées ; j’en ai souffert dans tous les
sens ; j’ai même reçu des chagrins de qui je m’y attendais le moins.
Ô mon Jésus, accordez à tous votre pardon, votre amour, votre
compassion. Purifiez, sanctifiez, brûlez dans votre divin amour et
appelez vite auprès de Vous votre petite fille agonisante...
Depuis le 24 mai, jour
de l’Esprit Saint, jour pendant lequel je demandais toute la
lumière, tout le feu de son divin Amour, de son amour
sanctificateur, l’état de mon âme a changé, mais ce jour-là encore,
dans le courent de l’après-midi, je disais : Je n’ai plus la vie de
la terre, je n’ai qu’un corps pour la souffrance.
A compter de ce
jour-là, je n’ai plus ressenti ce que presque continuellement je
ressentais : la vue d’horribles serpents, remplis d’immondice, qui
rentraient par la bouche et en sortaient, tirés par je ne sais qui,
me faisant penser aux damnés tourmentés par les démons. Je ne
supportais pas le gazouillis des oiseaux à l’aurore ou au coucher du
soleil, même sachant qu’en cela ils louaient leur Créateur. Leurs
gazouillis blessaient beaucoup mon âme. Je ne pouvais pas les
entendre avec joie. La soif que je ressentais était brûlante, quant
à la nostalgie des aliments, se ne sais même pas l’expliquer, et
tout cela semblait me pousser au désespoir, car je sentais qu’il
serait impossible de rassasier mes envies. Alors je disais à Jésus :
C’est pour Vous que je souffre, alors rassasiez Vous-même votre soif
d’amour, la soif que Vous avez d’âmes.
Le 25 on a remarque en
moi une différence : je n’avais pas d’autre transformation que celle
de mon âme. J’ai arrêté de ressentir les grands amertumes, les
ténèbres, les sécheresses et les agonies, sauf de temps à autre où
je ressentais de grands désirs de m’envoler vers le Ciel, allant
jusqu’à ressentir des impulsions qui me faisaient me soulever, comme
si j’avais des ailes et prenais l’envol vers le Ciel. Je ressentais
alors une entière confiance en Jésus et Marie et me conformais
toujours à leur divine volonté. Au milieu de tout cela, mon âme se
sentait comme en un jour de fête, des fois je me mettais même à
chanter avec une grande joie :
“Voir Dieu pour
toujours,
Dieu toujours : voilà le Ciel !
Si seulement j’y allais, etc.”
Il me semble partir
vers la Patrie céleste, vers mon Jésus, debout, les bras ouverts,
pour me reposer sur ses genoux.
Alors que je ne peux
plus me rassasier des désirs et nostalgies des plats de la terre,
j’aspire, je meurs du désir de me rassasier des plats célestes, car
eux seuls valent pour l’éternité.
Le fil divin qui relie
l’endroit où demeurait mon cœur est tout prêt de casser ; j’ai
l’impression qu’il a été limé. Ce qui le sauve c’est que la tempête
ne souffle que de temps en temps, ne le balançant que très peu.
Maintenant oui, je peux dire :
Le Ciel c’est pour
bientôt ; je vais voir mon Jésus, je vais voir la Mãezinha, je vais
jouir du Paradis, je vais aimer mes Amours éternellement. Je quitte
le monde sans regret : je ne lui appartiens pas.
“Mais non, je ne
suis pas folle ! Le 27 mai, quand j’assistais au mois de la
Mãezinha, j’ai eu ce pressentiment qui m’apaisait : Je meurs au mois
de mai ; la paix arrivera en juin.
Mon Père spirituel va être libéré et vient assister à mon décès. Je
mourrai un samedi après-midi, mon enterrement aura lieu le lundi,
premier jour du mois de Jésus”.
Nous ignorons la
source de cet ajout.
Probablement qu’en
cette période Alexandrina vivait la deuxième mort mystique. Père
Umberto Pasquale.
31 mai – Fête de
la très Sainte Trinité
A la tombée de la nuit
je sentais que le mince fil allait finalement céder. Dans mon état
d’âme j’attendais de voir ce que Jésus allait inventer pour moi dans
sa science divine, à moins que tout ne se termine avec ma mort.
Le lundi suivant,
premier juin, tôt le matin, j’ai senti que le mince fil avait cédé
et qu’il pendait de mon cœur, mais la science divine de Jésus devait
encore me surprendre. Peu après j’ai vu et j’ai senti descendre du
Ciel vers la terre et vers l’emplacement de mon cœur des rayons plus
brillants que ceux du soleil : ils semblaient venir du Cœur de mon
Jésus, s’attachant et se reflétant pour toujours à l’endroit de mon
cœur. Il fallait que je m’enveloppe complètement de ces rayons
d’amour, et jour après jours je m’y enveloppe davantage, jusqu’à me
transformer en eux. Ces rayons me mènent de la terre au Ciel. Ils
forment un canal dans lequel je dois me transformer et passer par
son intérieur. C’est par lui que je vais à Jésus.
Je me sens élevée à une
certaine hauteur de la terre. Il y a des moments où j’ai du mal à
résister à autant de nostalgie du Ciel. J’espère voir mon Jésus dans
peu de temps, ainsi que ma chère Mãezinha et tous mes amours après
lesquels je soupire. Toutefois je veux que le promesses de Jésus
s’accomplissent : je veux que l’on me redonne mon Père spirituel que
sans aucun motif licite on m’a enlevé dans les moments les plus
amers. Rien que pour cela et la détermination de la consécration du
monde par le Saint-Père m’obligent à vivre sur la terre, triste exil
que je supporte de moins en moins.
4 juin – Jour de
la “Fête-Dieu”
— Ma fille, ne crains
pas ton Jésus. Celui qui le possède et l’aime en vérité ne peut pas
le craindre. Jésus aimerait que tous parlent des bontés de son divin
Cœur, en toute simplicité et avec amour. Jésus aimerait que tous
parlent des bontés de son divin Cœur : de sa tendresse, de sa
compassion, de son pardon. Jésus est follement épris de tous ses
enfants. Jésus les aime passionnément et veut offrir à tous les
trésors inépuisables de son aimable Cœur. Jésus veut les voir tous
rassemblés autour de son Tabernacle, à l’aimer, à le recevoir à la
manière des hirondelles vis-à-vis de leurs petits : avec amour et
tendresse. Qu’ils sont timorés ceux qui craignent vraiment Jésus et
doutent de sa bonté et de sa miséricorde ! L’amour et la confiance
doivent toujours habiter l’âme qui aime vraiment et qui appartient à
Jésus.
― Ô Jésus, je me confie
pleinement en Vous. Vous allez exaucer mes demandes, n’est-ce pas,
Seigneur ? Et ensuite Vous allez immédiatement me prendre avec Vous
et m’emmener au Paradis. Le voulez-Vous bien, mon Jésus ? Quel
désir, quelle nostalgie j’ai du Ciel ! Je ne puis pas vivre ici, mon
Jésus ! Cet exil est terrifiant !
― Jésus va accorder à
la petite folle de l'Eucharistie tout ce qu’elle Lui demande. Jésus
ne peut pas cesser de veiller ni de regarder vers le fils de
prédilection qu’Il aime tant ! Jésus ne peut pas laisser au moment
décisif son épouse dans un total abandon. Jésus va tout lui accorder
et va lui donner le Ciel.
― Merci, Jésus, pour
toujours : un éternel merci !
6 juin – Premier
samedi
— Ma fille, ma fille,
Jésus est comme le petit oiseau qui ne peut pas se poser, qui ne
peut pas se reposer. Jésus s’affaire avec force à demander de
l'amour, l’amour les tous les cœurs. Quelle tristesse que d’aimer et
ne pas être aimé ; aimer et être offensé ! Mais heureusement que la
petite folle de l'amour divin l’aime passionnément, il l'aime comme
Jésus le désire, Il l'aime avec l'amour le plus pur, d'un l'amour
détaché de tout ce qui est terrestre ; c'est un amour saint, c’est
l’amour divin. C'est à cause de cet amour que Jésus s'est épris de
sa petite folle ; c'est à cause de l’amour de la petite folle de
l'Eucharistie que Jésus se passionne pour les âmes qui l'aiment.
C'est à cause de cet amour très pur que Jésus va lui accorder une
mort d'amour, amour, seulement amour. Jésus est fou de joie, Jésus
est très content du Directeur spirituel de sa chère benjamine. C’est
grâce aux humiliations qu’il est en train de vivre, qu’il sera
glorifié et exalté. Grand est le prix dans le Ciel et grande sera
sur la terre encore la récompense. Jésus est fou, fou de joie
vis-à-vis du Docteur, à cause de la sainte attention avec laquelle
il mène une aussi grande mission. Jésus l'a choisi pour veiller sur
sa crucifiée et les âmes que j'aime le plus. Le divin Cœur de Jésus
est surabondamment rempli de grâces qui seront versées sur toutes
ces âmes. Le monde et Satan les haïssent et les haïront toujours. Et
cela à cause de leur vanité et de leur orgueil : voilà la raison de
leur rage. Mais Jésus et sa Mère bénie aiment ces âmes. Jésus
triomphe et est vainqueur en elles, et cela suffit !
― Ô mon Jésus,
défendez-les toujours, aimez-les toujours passionnément, triomphez
et soyez vainqueur avec elles. Alors, ramenez-moi vite au Ciel afin
que je puisse faire descendre sur elles vos grâces et vos
bénédictions. Oui, oui, mon Jésus, j’ai confiance en Vous, mon
Amour !
― Le Ciel est bien plus
proche que la terre de la petite folle de Jésus.
― Emmenez-moi,
emmenez-moi alors : je ne désire que cela !
6 juin, vers 13
heures
Deolinda était couchée
à côté de moi; elle dormait. Soudain j'ai vu, entre mon lit et
l’endroit où Deolinda se reposait, l’horrible figure de Satan. Il
était monté sur un chien brun, tacheté de noir, et Satan avait des
mains comme celles d’un singe, avec ses doigts distincts; sa tenue
était rouge. C'était un monstre informe, la tête baissée mais les
yeux levés pour me dévisager. Je ne l’ai pas vu entrer ni sortir ;
néanmoins cela m’a effrayée et j’ai essayé d'appeler Deolinda qui,
ayant un mal de dents, dormait sous l’effet d'un comprimé de Vermon
et donc n'a pas entendu ma voix. Je crois que je l'ai appelée deux
fois ; ensuite j’ai cessé de l’appeler car cela me peinait de la
déranger pendant son repos. Entretemps Satan a disparu.
9 juin, vers 13
heures
Précédemment, certains
jours, j'entendais des harmonies très douces, comme des accords
d'instruments célestes, exécutant une musique angélique. Comme
j'aimais la douceur de cette musique divine, j'oubliais le monde et
la vie terrestre, je perdais la notion de moi-même et il me semblait
alors vivre dans une région étrange où tout est bonheur ineffable.
Ce fut le 9 juin 1942,
vers 13 heures, que m'est apparue sur le lit, descendant du Ciel la
figure éblouissante de la Mãezinha qui semble s'être placée devant
moi, un peu vers ma gauche. Elle était habillée de riches robes
brillantes, de couleurs variées; elle avait les pieds nus. Elle
s’est approchée de moi, m'a caressée et de sa main droite m’a
indiqué le Ciel. Elle semblait émue de ma souffrance; elle m'en a
promis la récompense et m’a redonné confiance.
Le trône où Elle était
assise était très brillant comme l’or pâle où le soleil projetterait
ses plus brillants rayons. Ineffable fut la consolation que m'a
laissée cette première apparition. Pendant quelques minutes Elle
disparut pour réapparaître de nouveau plus près de moi, du côté
droit : alors j’ai pu voir qu’il s’agissait du Cœur Immaculé de
Marie. Comme la première fois, Elle m’a caressée, toutefois Elle n'a
pas fait le geste d'indiquer le Ciel. Sa présence m'a consolée
profondément et cette consolation céleste est restée dans mon âme,
qui durant quelques jours a joui de ce réconfort merveilleux. Ce
réconfort était comme un iman qui m'élevait vers Jésus, et je me
sentais alors comme dans la béatitude.
12 juin – Fête du
Sacré-Cœur
Au cours de
l’après-midi, peut-être vers les 18 heures solaires, j'ai vu encore
ce faisceau de rayons célestes qui m'avaient visitée et qui me
rapprochaient tant du Ciel.
Maintenant nouvelle
élévation, nouveau réconfort. Il me semble que maintenant je sois
placée tout près de la porte du Paradis : il ne manquait plus que je
frappe pour y entrer ! Cette proximité m'a procuré des désirs
dévorants du Ciel, qui parfois me sont difficiles à supporter. Il me
semblait avoir deux petites ailes et avoir la force de voler, mais
quelque chose empêchait le mouvement des ailes ; une pression sans
prison me l'enlevait, et faisait que je ne pouvais pas vaincre cette
pression, et cela m'affligeait. Néanmoins j’avais l'impression que
cette prison de mes ailes avait quelque chose à voir avec la
méchanceté des hommes contre la volonté de mon Bien-aimée qui
souhaitait me recevoir et me posséder dans son amour.
27 juin
Voici mon vécu : un
minuscule souffle de vie ! Seulement corps pour souffrir et rien,
rien de plus ! Quel désir du Ciel ! Quelles anxiétés si
douloureuses ! Les rayons divins m'ont même entraînée tout près,
tout près des portes du Ciel, mais un je ne sais quoi humain
m'oblige à vivre sur la terre, m'oblige à l'immolation continuelle.
Ils ne me rendent pas mon Père spirituel. Pauvre de moi, et je ne
peux plus attendre ! Je regarde et regarde encore mon corps pour
voir s’il existe encore. Ce qui se passe lui Jésus seul le connaît.
Il me semble que je ne peux même pas vivre unie à Jésus ni à l'amour
qui me tuera. Qu’est-ce que la vie de la victime ! Néanmoins je ne
me suis pas repentie de mon offrande à Jésus et pour les âmes. Il
déverse sur moi, de temps en temps, les rayons de son amour.
Ce fut ce jour du 27
juin, qui était un samedi. Tandis que sans pouvoir prier, je
redoublais mon effort pour Lui être unie dans l’Eucharistie, j’étais
loin de penser recevoir de lui aussi rapidement la récompense.
― Jésus, moi toute pour
Vous et Vous tout pour moi ! Je veux être toujours unie à Vous dans
toutes les prisons de l'amour.
Quelle merveille !
Soudain, devant moi j'ai vu un tabernacle. La petite porte était
fermée, mais par la moindre petite feinte de la porte du tabernacle
sortaient de nombreux rayons dorés ; ils répandaient beaucoup de
lumière et tous les rayons venaient frapper et se poser sur ma
pauvre poitrine. Cela n'a pas été une illusion de ma part, car je
n'avais jamais pensé que Jésus paierait avec autant de générosité
mon grand effort.
4 juillet
1942 – Premier samedi
— Le Soleil brillant,
le soleil splendide sera celui qui va se refléter dans le monde. Les
hommes ne veulent pas laisser refléter sa luminosité. Malheur à eux,
pauvres hommes qui s'opposent aux desseins du Seigneur ! Jésus se
console et se réjouit dans les âmes de ses aimées. Jésus se sent
bien dans la blancheur des âmes pures. Les rayons de l'amour divin
forment sur elles une auréole brillante et charmante qui attire à
elle le monde et les cœurs. Ceux qui se disent amis de Jésus ne
connaissent pas les âmes ses épouses. Jésus est très mécontent de la
plupart de ses disciples : ils n'ont pas la lumière, ne la cherchent
pas, ne savent pas, ne cherchent pas à savoir. Ils s’emploient comme
Satan à mettre par terre les œuvres du Seigneur. Ils écartent d’eux
les bénédictions divines et la protection de la Vierge Marie.
La céleste Petite Maman
est prête à venir chercher sa petite fille pour la prendre auprès
d’Elle. La récompense est très précieuse.
La souffrance du Père
spirituel de la petite folle de Jésus est cause de beaucoup de
gloire et de triomphe dans le Ciel. Pauvres sont ceux qui le font
tant souffrir. Jésus ne laisse jamais rien sans récompense.
Jésus accorde beaucoup
de grâces et beaucoup d’amour au médecin du corps de la petite folle
de l’Eucharistie. Jésus sera tout entier en eux et tout pour eux.
Les hommes ont rendue
lourde et triste ma vie sur la terre! Oh ! triste non ; laissez-moi
m’expliquer : tout ce qui est supporté par amour pour Jésus et pour
les âmes est joyeux et consolant ! Pauvres sont ceux qui s’opposent
aux desseins de Jésus !
J'ai surmonté, même si
lentement et très blessée, les souffrances que les hommes ont
inventées contre moi. Je suis montée, mais j’ai dû m’arrêter à la
porte du Ciel. C'est là que je me trouve immobilisée depuis de longs
jours, n’apercevant qu’une petite ouverture ; j'ai compris que
c'était là l’entrée du Paradis. Néanmoins la prison que les hommes
m'ont faite est telle qu’il me faut y rester pendant un long espace
de temps. Jusqu’à quand ? Jésus seul le sait. J’ai confiance et
j’espère en Lui. Mes envols sont aussitôt fortement retenus et Jésus
seul peut les détacher, Lui seul peut transformer les cœurs des
hommes qui semblent ne rien comprendre et qui portent sur moi leur
jugement. C’est doux d’aimer et de suivre Jésus, mais pauvre de moi
s’Il m’abandonne un seul instant ! Il m’a fait comprendre que pour
moi, sur la terre tout était complété. Cela s’est passé pendant la
nuit, mais je suis certaine que je ne dormais pas : j’étais
parfaitement consciente. J’ai vu devant moi deux anges : qu’ils
étaient beaux ! Ils ne pouvaient venir que du Ciel ! L’un d’eux
avait dans ses mains une couronne brillante et tout à fait achevée,
l’autre une grande palme du martyre. Tout cela apporta du réconfort
à mon âme. J’étais heureuse de voir que Jésus me montrait que ma
mission sur la terre touchait à sa fin, mais plus je m’efforçais
pour me libérer des liens que m’attachaient à la terre, moins j’y
parvenais. J’attendrai que Jésus me libère, Le priant toujours pour
ceux qui m’y attachent. Pauvres malheureux ! Ils ne comprennent pas
sa grandeur ni la grandeur des âmes. Je souffrirai pour eux. Si je
ne souffrais pas autant à cause d’eux, je ne pourrais pas procurer
autant de gloire à Jésus ni Lui sauver autant d’âmes. Qu’elle est
poignante la douleur de me sentir aussi près du Ciel et de ne
pouvoir y entrer de suite ! Parfois j’ai du mal à contenir mes
larmes. J’ai l’impression que la nostalgie du Ciel me tue ! Je n’ai
plus de vie sur la terre, ni non plus quoi que ce soit qui me
satisfasse ! Seul le Ciel me satisferait, là seulement je serais
heureuse ! Le Ciel seul sera ma vie ! Ce ne sera qu’au Ciel que les
élans de mon cœur seront comblés ! Combien il est beau, le Ciel!
Combien j’aimerais que tous, sur la terre, puissent le connaître !
Combien malheureux sont ceux qui méprisent Jésus et suivent Satan !
1er
août 1942 – Premier samedi
— Le Cœur de Jésus et
celui de sa très Sainte Mère sont joyeux et jubilent à cause des
souffrances de la petite folle, la folle de Jésus, la crucifiée du
calvaire et des souffrances de celui qui reste et le restera pour
l’éternité son Père spirituel. Combien d’honneur et de gloire ces
mois de souffrances procurent au Ciel ! Les âmes, épouses de Jésus,
les âmes martyrisées qui s’immolent pour Jésus et pour les âmes…
Jésus et Marie désirent tant voir briller dans le monde entier ce
phare resplendissant. Les hommes cherchent à l’éteindre et à le
détruire, mais en vain. Jésus, caché dans sa victime, se soumet à
ses faux juges. Jésus, caché dans sa victime, se soumet à la volonté
du Père spirituel et à celle du médecin de sa petite folle. Tout ce
qu’ils feront pour la gloire du Très-Haut, Jésus l’accueillera avec
bienveillance. Rien ne serait nécessaire, Jésus Lui-même ne le
voudrait pas si les aveugles voulaient voir. Quel aveuglement,
quelle cruauté ! On fait subir aux âmes les plus aimantes de Jésus
les pires martyrs. On soumet aux pires humiliations ceux et celles
qui sont les pupilles les plus chères à Jésus. Jésus, le Roi
d’Amour, vainc et sera toujours vainqueur. Il aime follement les
âmes qui aiment et qui entourent sa crucifiée. Combien sont beaux
les desseins de Jésus ! Combien est charmant tout ce qu’il laisse
transparaître à travers son aimée !
— Ô mon Jésus, combien
grand est votre amour envers moi ! Accordez-moi le courage dont j’ai
besoin, accordez-moi votre amour infini et faites-moi partir pour ma
Patrie ! J’appartiens au Ciel et non point à la terre ; je suis
toute à vous et non point au monde !
— Le Ciel va bientôt
vivre ce grand triomphe : voir y entrer la plus grande héroïne de
l’humanité.
— Merci, mon Jésus,
merci !
15 août 1942
— C’est avec les liens
les plus fermes et du plus pur amour que Jésus attache à son divin
Cœur et à celui de sa très-Sainte Mère la petite folle d’amour, la
victime de la plus grande immolation, la plus grande joie et gloire
du Très-Haut que la terre ait jamais connue.
C’est avec ces mêmes
liens d’amour que Jésus attache à ces mêmes divins Cœurs le Père
spirituel de sa benjamine, le médecin et les âmes bien-aimées qui se
sacrifient pour elle.
Les prédilections de
l’héroïne du calvaire sont les prédilections de Jésus. Jésus aime
passionnément sa benjamine, Il l’aime plus que les pupilles de ses
yeux. Jésus va lui donner le Ciel. Jésus va lui donner toute la
gloire et tout l’amour afin qu’elle le distribue aux âmes.
— Ô mon Jésus, vos
caresses et celles de la Mãezinha
sont si douces !
— C’est la récompense
pour tant de souffrance et de martyr ; c’est la folie d’amour de
Jésus et de la Mãezinha envers leur crucifiée. C’est avec ce même
amour que Jésus et Marie aiment et se donnent aux âmes qui aiment
leur petite folle.
La Très-Sainte Trinité
s’incline, le Saint Esprit étend ses rayons et les fait briller sur
ce coffre très riche du Très-Saint Cœur de Jésus.
— Merci, merci, mon
Jésus !
26 août 1942
Cela ne coûte rien de
nous offrir à Jésus et de Lui dire que tout notre corps est à Lui,
de Lui dire : Je suis tout à vous pour le martyr et pour la croix.
Mais quand on perçoit les rigueurs de la divine Justice, quand Jésus
nous montre qu’il a bien pris au sérieux notre offrande et qu’Il a
bien voulu se servir de notre faible corps comme instrument pour le
salut du monde, c’est à en mourir. Combien terrible et effrayante
est la Justice dine !
Le 21 août [1942], qui
était un vendredi, Jésus est venu comme d’habitude s’épancher avec
moi, me gratifiant de ses douces et tendres caresses.
Ce jour-là, dans sa bonté infinie, Il n’a pas voulu m’en priver. Il
fallait que je souffre pour expérimenter ce que le Père éternel
réservait au monde coupable, mais surtout au Portugal. Je sentais
tout en feu, je ne voyais que des ruines. Les flammes incendiaient
le Portugal au point qu’il n’y restait plus pierre sur pierre, que
l’on n’y voyait rien même du plus haut édifice. Suite aux plaintes
de Notre-Seigneur chargé de tout le poids de la divine Justice, je
suis restée épouvantée pendant plusieurs jours et plusieurs nuits.
Très souvent tout mon corps tremblait d’épouvante. Les flammes
continuaient et je me sentais au milieu de toute cette destruction.
Il m’aurait été impossible de résister à cette souffrance si elle se
prolongeait et si Jésus n’était pas venu me montrer une solution
atténuante à cette situation. Ce que je vais décrire, je ne jure pas
de sa réalité, même si je sens pouvoir le jurer.
C’était vers 4 heures
du matin : un Paradis s’est formé autours de moi. Il était
uniquement composé d’anges très beaux, brillants comme l’or. Je ne
voyais que des petites têtes et des petites ailes ; et tous
voletaient continuellement et me fixaient de leurs yeux brillants.
J’ai compris que ce battement d’ailes était une invitation pour moi
à aller au Paradis. Mon âme a ressenti un tel réconfort que je suis
sortie hors de moi : je ne vivais plus sur la terre et une force
invisible me faisait monter et m’approcher de ces petits anges. Je
ne sais pas ce qui me retenait en l’air. Dès lors, toute ma peur des
menaces du Seigneur fut doucement soulagée : la brillance des anges
et leurs battements d’ailes vainquent tout ce qui est souffrance,
tout ce qui menace le monde et le Portugal. Le Ciel est plus
puissant que la terre ! L’amour de Jésus est plus fort que sa divine
Justice !
Mon âme m’oblige à
décrire tout cela, et moi, je laisse à mon Père spirituel de
discerner s’il s’agit ici d’un rêve ou d’une illusion ou s’il s’agit
d’une vraie réalité. Je crois que je ne dormais pas et le réconfort
que j’y ai reçu ne pouvait venir que du Ciel. Ce fut pour moi un
remède divin.
5 septembre
1942 – Premier samedi
― La souffrance des
âmes bien-aimées et victimes de Jésus sont sa gloire, son triomphe.
Combien il est sublime, combien il est beau le chemin des élus du
Seigneur ! La crucifiée de Jésus souffre avec les âmes qui
l’entourent, mais des jours viendront, et ils ne sont plus très
loin, ou toute douleur se transformera en joie. Jésus se réjouit,
Jésus se console avec ceux qui souffrent. La souffrance est la plus
grande preuve d’amour de Jésus envers l’âme et de l’âme envers
Jésus. La souffrance est le salut des pécheurs.
― Jésus, mon martyre
a-t-il sauvé beaucoup d’âmes ?
― Des milliers, des
milliers ; bientôt tu le verras, petite folle de Jésus.
― Jésus, le prêtre, le
Père José était celui dont vous vous m’aviez parlé il y a longtemps,
dont vous vous étiez plaint et pour lequel je souffrais ? S’est-il
sauvé ?
― Oui, c’était bien
lui, ma petite folle. Il s’est sauvé, mais il est au plus profond du
Purgatoire. Il a besoin de prières, de beaucoup de prières. Il a
beaucoup offensé Jésus, mais son repentir et sa douleurs ont été
très grands. Que de bonheur qu’une crucifiée et épouse de Jésus lui
donne les âmes qui l’ont tant offensé et tant blessé !
― Bénie soit toute la
souffrance que vous me donnez, béni soit le remède des âmes !
― Écoute, petite fille
bien-aimée. Au Nom de Jésus affirme, jure à ton Père spirituel qu’il
est follement aimé par Jésus et Marie. L'amour de Jésus dépasse tous
les abandons des hommes. Les hommes sont aveugles, mais un temps
viendra où ils pleureront leur cécité. Jésus règne, Jésus gagne,
Jésus ne consent pas que son fils de prédilection abandonne de son
poste. Il sera toujours dans le temps et dans l'éternité le Père
spirituel, le guide et la lumière de la petite folle de Jésus. Jésus
demande au médecin de sa crucifiée qu’il demande à Monseigneur
l’Archevêque qu’il fasse triompher sa cause, qu’il fasse que le
monde soit consacré à l'Immaculé Cœur de la Vierge-Mère. Qu’ils
écoutent la voix de Jésus, qu’ils s’empressent à sauver le monde, à
sauver le Portugal. Jésus aime le Docteur Azevedo et sur lui
descendent toutes les grâces divines et son Amour. Que l’on viennent
aux études s’ils le veulent ainsi, mais sans grand retard, parce que
le Ciel s'approche.
― Jésus,
merci pour vos caresses et et celles de la Petite-Maman qui me porte
dans ses bras, m’embrasse et me caresse doucement.
20 septembre 1942
Triomphez en moi, mon
Jésus. Je sens que petit-à-petit le chemin s’ouvre, chemin
qu’amèrement j'ai suivi seulement par votre amour et pour l’amour
des âmes, j’ai parcouru. Déjà presque je peux entrer dans le Ciel ;
au prix de beaucoup de douleur la tempête semble s’apaiser. Quelle
averse aussi forte. Quelle furie, quelle furie qui a tant blessé mon
pauvre cœur. Soyez béni, mon Amour, bénie soit votre main très
sainte qui dévie de mon chemin tout ce qui m’empêche d’avancer.
Je sens que le Ciel est
ouvert presque de paire en paire pour me recevoir. Puis-je déjà
entrer, mon Jésus ? Je ne sais pas quel est maintenant l’état de mon
âme. Il me semble que je me trouve entre le Purgatoire et le Ciel ;
la plupart du temps je ne sens ni grande souffrance, ni grande joie.
Néanmoins, à certains moments, pauvre de moi, Jésus, je me vois en
cendres dans l'abîme ; sans rien avoir qui me soutienne, et il
semble tomber dedans. Et aussitôt vous venez m'en libérer d’une
aussi grande horreur, vous me soutenez, m’écartez de lui. Et voici
qu’à nouveau soutenue seulement par l'amour de votre très saint
Cœur, je reprends espoir. Je ne tombe pas, Jésus me soutient. Et,
complètement folle de vous, je me lance dans vos divins bras et sens
que Vous avec beaucoup d'amour m’embrassez et accueillez. Avec
Jésus, toute l'amertume est douce, toute la douleur devient suave.
Ah ! Si tous connaissaient l'amour de Jésus ! …
30 septembre 1942
Après la Sainte
Communion
J’ai senti que Jésus
unissait ses lèvres aux miennes, et que pareillement Il unissait son
divin Cœur au mien, l’ouvrant carrément pour me recevoir tout
entière, et Il me disait :
― Ma fille, lèvres
contre lèvres, cœur contre cœur, amour avec amour pour tout embraser
dans un seul feu divin. Ma fille, te j'ai demandé toute la
réparation, J’ai demandé en dernier lieu la réparation contre la
gourmandise ; je ne te demanderai rien de plus. Je suis si offensé !
Ils volent, piétinent l'aliment des pauvres. Les anxiétés que tu as
de te nourrir sont les anxiétés que les pécheurs ont pour satisfaire
leurs appétits, leurs passions. Les envies que tu ressens de
l'alimentation ce sont les envies que J’ai de posséder les âmes.
Tout finit, mais non point comme mes brefs. Combien grand est ta
gloire ! Le monde ne te comprend pas, réjouit-toi ; Moi non plus il
ne m'a pas compris et beaucoup encore ne me comprennent pas.
3 octobre
1942 – Premier samedi du mois
― Jésus est atteint
d’une profonde amertume et d’une grande tristesse à cause des péchés
du monde. Il saigne, et saigne continuellement. Quelle ronceraie,
quelle mer de douleurs dans son divin Cœur. Faites vite, vite, la
consécration du monde au Cœur Immaculée de Marie. Jésus ne la
demande plus, mais Il rappelle aux hommes ses divins désirs. Jésus
ne demande plus, mais Il indique aux hommes les moyens, le chemin
qui peut sauver l’humanité. Vite, vite, consacrez le monde à sa
Reine. Alors la paix viendra et le soleil éclairera toute
l’humanité. Jésus ne manque jamais à ce qu’Il promets. Jésus
triomphe et brille dans les âmes par son soleil divin. Jésus se
réjouit et prend son plaisir dans les âmes-victimes. Jésus se
réjouit et se console dans les âmes qui l’aiment. Vite, vite, venez
à Jésus ; c’est lui qui vous appelle. Combien Jésus aimerait
s’inculquer dans les âmes et dans les cœurs, être en eux feu, feu,
rien que feu d’amour ! Jésus veut, aujourd’hui plus que jamais, se
faire connaître à tous ses enfants. C’est par le moyen de la petite
folle de l’Eucharistie, de la crucifiée du Calvaire que Jésus est
actuellement et le sera à travers les temps, très connu et aimé.
― Ô mon Jésus, ce sont
là mes souhaits. Que jamais dans ma vie je ne puisse vous opposer un
refus. Régnez, régnez à jamais sur mon pauvre cœur.
― Il n’est pas pauvre,
fille aimée, il n’est pas pauvre, fille chérie. Tu as la brillance,
la candeur du lys. Tu es très riche, car tu possèdes la richesse
divine. Tu es le charme et l’attrait de la divine Trinité, tu es la
gloire de la Cours céleste.
― Ô mon Jésus, s’il en
est ainsi, et je vous crois, toute cette brillance, toute cette
beauté sont à Vous : toute richesse vous appartient. Moi, je ne suis
qu’une pauvrette, un néant !
― Écoute, ma fille :
dis à ton Père spirituel que le divin Cœur de Jésus est ouvert pour
lui, car il l’aime passionnément. La preuve la plus évidente que
Jésus lui donne c’est de le faire traverser d’aussi grandes
humiliations et souffrances, le faisant ressembler encore davantage
à Lui. Dis aussi à ton médecin, dis à cette grande âme, dis à ce
propagateur de ma divine lumière et de mon amour dans les cœurs, que
je l’aime beaucoup et que Je l’aimerai encore davantage pour autant
qu’il continue à s’occuper de moi et de ma cause. L’œuvre est de
Dieu, et Dieu triomphera toujours.
― Merci, merci
beaucoup, mon Jésus !
7 novembre
1942 – Premier samedi du mois
― Réjouis-toi, fille
bien-aimée, réjouis-toi fille chérie, avec ton Jésus et ta
Petite-Maman bien-aimée ; réjouis-toi car les desseins de Jésus sont
réalisés.
Réjouis-toi, car de grandes bénédictions vont tomber sur la terre
coupable. Ma fille, ma petite fille, tu es mon attrait et
l’enchantement de mes regards. Jésus voit dans sa petite folle la
plus grande joie au monde. Jésus voit dans sa benjamine tous les
attraits de son divin Cœur. Voila pourquoi Jésus se sert d’elle pour
être son cana divin. Le monde reçoit par la crucifiée do calvaire
[de Balasar] toutes les grâces et l’amour de Jésus. Dis, dis, ma
fille, à ton Père spirituel, celui que J’ai choisi pour t’éclairer,
que mon amour divin se déverse sur lui en toute abondance, qu’il
fait en tout ma divine volonté.
Oui, oui, Jésus est
très content de lui et mécontent de ceux qui le font souffrir
effrontément. Dis, dis, ma fille, à ton père spirituel, à celui que
j’ai choisi moi-même pour te guider vers moi, dis-lui qu’il informe
le Saint-Père que la promesse lui est faite qu’il ira tout droit au
ciel, sans même passer par le Purgatoire, s’il écoute ma demande. Il
aura encore comme prix d’avoir écouté ma voix, de bénéficier de
toutes les lumières de l’Esprit saint et que jamais il ne fera rien
contre la volonté divine : il aura toujours les lumières nécessaires
ma divine volonté sur la terre.
Jésus est très content
de lui : combien grande sera la récompense qu’il recevra de moi par
ma petite folle d’amour, quand elle sera assise, au ciel, sur son
trône. Jésus va conduire sa bien-aimée au Paradis e fera également
que les hommes arrêtent la guerre. Dis, ma fille, à ton médecin que
je ne peux pas faire autrement que de le combler de grâces et des
plus grandes preuves d’amour pour avoir été le soutien, le bras
ferme de la cause divine lors des moments où les hommes ont essayé
de la détruire. La cause de Jésus ne tombe pas, elle se lèvera
encore bien davantage.
Triomphe, triomphe,
amour, amour, amour. Voila ce qui tombe sur la petite folle de Jésus
et sur ceux qui l’entourent et l’aiment et pour lesquels elle
intercède, amour, amour, amour sans fin.
Ô mon bien-aimé Jésus,
je suis confuse, humilié et abattue. Je ne sais dire rien d’autre ;
pardonnez mes fautes ; daignez recevoir mon éternel remerciement.
Donnez-nous la paix, accordez-moi tout ce que je vous demande, mon
Jésus.
5 décembre
1942 – Prémier samedi du mois
— Ó belle, ó belle, ó
belle, ó pure, ó enchantement de Jésus ! Elles sont proches les
noces célestes. Les prophéties de Jésus sont presque toutes
réalisées. Le petit fou de sa petite folle vient chercher sa
bien-aimée. L’heure de la lumière est arrivée, ainsi que l’heure du
salut. Dis, ma fille, dit, ma bien-aimée, dis à ton Père spirituel
que je suis fou, fou d’amour pour lui et qu’avec lui je vais
triompher. L’heure est arrivée pour lui de prendre son poste, elle
est arrivé heure, pour les hommes de laisser s’accomplir ma divine
volonté. Bientôt la guerre prendra fin ; ce seront des jours de
gloire et de triomphe.
Ma petite fille, ma
toute petite, Moi et ma Mère bénie nous sommes fous d’amour pour
toi ! Et également fous de ceux qui t’aiment et de ceux qui te
soutiennent.
Ô, quelle place de
choix ils ont dans nos Cœurs !
Dis, dis, ma petite
fille, dis à ton Père spirituel que sa souffrance est inscrite au
Ciel en lettres d’or. Dis, ma petite fille, dis à ton médecin que Je
l’aime, que Je prends soin de lui et des siens comme il prend soin
de toi et de ma cause.
Quelle grande joie il procure à mon Cœur ! Prends, ma fille, reçoit
mon amour, donne-le à tous ceux qui te sont chers et dis leur bien
que c’est le mien.
— Merci, mon Jésus.
Donnez-moi cette immensité d'amour : jamais je ne me fatiguerai de
l'éparpiller sur la terre.
13 décembre 1942
Au petit matin du 13,
quand je priais l’Ave Marie à la Petite Maman, suivi d’une prière
jaculatoire pour diverses intentions, j'ai vu la Vierge de Fátima
dans sa taille naturelle élevée à une grande hauteur, suspendue dans
l'air. En bas autour d'Elle une multitude innombrable vers lequel
elle s'inclinait et regardait avec une affection indicible. Mon cœur
semblait ne pas tenir dans ma poitrine; il battait tellement fort!
Je me suis sentie attirée vers Elle, il m’a semblé sortir de
moi-même et être transportée dans une autre région : je ne voyais
plus la terre. Je ne sais pas combien de temps que je suis restée
là.
25 décembre
1942 – Une heure du matin
Après avoir fait mes
demandes à Jésus — et j’en avais tellement à Lui faire ! — je Lui ai
dit :
— Je ne vous demande
pas de vous voir dans l'étable, car je sais et je crois que vous
êtes dans l'étable de mon cœur, mais je vous demande de m’accorder
ce que je vous demande. Il a daigné me dire :
— Ma fille, ma fille,
toujours ferme dans ta foi, toujours ferme dans ta confiance, Jésus
ne te trompe pas et toi, ne te trompes pas, tu sais que c'est Jésus.
Les confondus ce sont ceux qui te font souffrir. L'heure du triomphe
ne tarde pas. Tes fêtes sont terminés que la terre; tu vas les voir
dans le Ciel avec tout l’éclat, avec tout l'amour.
Le Ciel s’est ouvert
pour toi, ma bien-aimée, déjà tu peux presque y pénétrer. Reçois
tout l'amour et toute la grâce de l’Enfant Jésus avec droit de le
partager avec ceux qui t'entourent, qui t'aiment, qui te sont chers.
— Ô mon Jésus, je
voudrais avoir des mots pour vous remercier comme vous en êtes
digne, mais je ne les sais pas; j’aimerais vous rendre tout
l’honneur, toute la gloire et tout l’amour, j’aimerais vous dire
tout cela. Mais, comme je ne sais rien dire, je vous dis simplement
merci, mon Jésus.
Après la Communion
— Aie confiance,
confie, ma fille, je te donne ton Père spirituel. Je prends en
compte toute la réparation et consolation que tu as procuée à mon
divin Cœur. J’ai vaincu le monde et je vaincrai le cœur des homes.
Du 30 au 31
décembre 1942
Vers 1 heure 30 du
matin je baignais dans la sueur, je ressentais des douleurs aiguës
dans tout mon corps : je ne pouvais pas me reposer. Parfois je
sentais le besoin de dormir, car grande était la fatigue dans ma
tête. Comme je ne pouvais pas dormir, je disais à Jésus : Jouissez
vous au moins, mon amour, pendant que je souffre, acceptez mes
douleurs pour réparer les offenses par lesquelles, vous et la Petite
Maman vous êtes offensés. Que tout soit pour votre amour et pour
pécheurs. Ainsi je passais les heures unie à Jésus au très
Saint-Sacrement et à la très Sainte Trinité. Je me sentais heureuse
dans ma douleur. Tout à coup, sans que j’y pense, sont descendus sur
mon lit deux rangées d’angelots très beaux qui battaient des ailes.
Le devant s’est ouvert, c’était comme le firmament céleste : Que
c’était beau ! Que c’était beau ! Une colombe blanche, tout là-haut,
dans les hauteurs, laissait tomber beaucoup et très nombreux de
rayons de lumière. Dans un trône, au-dessous, était Jésus, tenant
dans la main une grande croix. Il était beau et belle était la
croix. C'était la croix de la Rédemption. À son côté de Lui la
Mãezinha était assise comme une Reine. Au retour un grand nombre de
personnes habillées de vêtements de cérémonie différents. Quelle
beauté que tout cela ! Quand je l’ai raconté, ma sœur m’a dit :
“Cela vaut bien la peine de souffrir : douleurs, sueurs et angoisses
de l’âme pour jouir de choses aussi belles, même si pendant de brefs
instants ! La richesse c’est le ciel ! Si tous le connaissaient !
Plus personne n’offenserait Jésus, du moins dans l’espoir de jouir
au Paradis !”
En tous cas, cette joie
fut pour vous, mon Jésus. Quelques instants après, déjà le doute me
tourmentait. Ne me suis-je pas trompée ? Serait-ce illusion ? Mon
Dieu, je ne veux tromper personne !...
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