On a dit
d'Alexandrina qu'elle possédait toutes les vertus. Son directeur de
conscience, le Père Mariano Pinho déclarait qu’il n’y avait pas une
seule vertu où elle ne fût excellente, même en celles où elle était
particulièrement éprouvée: par exemple l’obéissance à l’Autorité
ecclésiastique et à ses directeurs, ou sa patience mise à rude
épreuve, à cause de la maladie et plus tard en raison du grand
nombre de personnes qui venaient la visiter inopportunément. Jamais
elle ne manqua à la charité envers le prochain, en particulier
envers ceux qui lui causaient de très graves chagrins. Enfin, on ne
peut pas passer sous silence son extrême humilité, et son désir
constant de rechercher et d’accomplir la volonté de Dieu au prix du
renoncement total à ses propres désirs et goûts personnels.
3-1-Portrait
d'enfance
Comme tous les
saints Alexandrina, parlant de sa jeunesse, se découvre de nombreux
défauts: défauts de jeunesse qui sont peut-être des qualités en
puissance. Ainsi, dans son journal, elle se décrit bouillonnante,
espiègle, parfois méchante, mais toujours serviable. C'était un vrai
garçon manqué, un boute-en-train, mais à l'âme contemplative. Toute
jeune encore, elle aimait travailler et s'occuper de la maison et du
ménage. Dès l'âge de neuf ans, elle participa aux travaux des
champs, "mais dès qu'elle le
pouvait, elle s'extasiait à contempler la nature: l’aurore, le lever
du soleil, le chant des oiseaux, le gargouillement de l’eau la
pénétraient et la transportaient à une si profonde contemplation
qu'elle oubliait qu'elle vivait dans le monde."
Elle aimait aller
à l'église et prier devant la statue de la Vierge Marie.
Intelligente elle sut rapidement son catéchisme et fit sa première
communion dès l'âge de sept ans. Sa charité envers ceux qui
souffraient était constante, et très jeune encore, elle veillait les
mourants et aidait ceux qui procédaient à la toilette funèbre.
3-2-Portrait
de jeunesse
3-2-1-Souffrances
physiques et spirituelles
C'est à l'âge de
quatorze ans qu'Alexandrina commença à beaucoup souffrir
physiquement. Mais bien vite, à la souffrance physique s'ajoutèrent
des douleurs morales, car déjà on se moquait d'elle. Elle écrit:
"Tous avaient de la peine
pour moi. J’ai souffert uniquement pour mes maux physiques durant
peu de temps. Bientôt mes plus grands amis, les familiers et même
Monsieur le Curé
se retournèrent contre moi: plusieurs personnes se moquaient de mon
allure. Combien j’ai pleuré..."
On critiquait
aussi Alexandrina parce qu'elle ne mangeait pas, mais, dit-elle,
"je ne mangeais pas parce que je ne le pouvais pas." Puis elle
explique comment elle dut "passer six ans entre le lit et la
couchette. Une fois, cinq mois se sont passés sans qu'elle puisse se
lever. Mais cette souffrance spirituelle qu'elle dut supporter
pendant près de douze ans, elle ne la révéla à personne." Elle
écrit encore: "Me trouvant
seule, prisonnière de mon lit, je regardais en larmes, le tableau du
Sacré-Cœur de Jésus: je le suppliais de me libérer de ce tourment et
de me donner des lumières sur ce que je devais faire. Je me
recommandais aussi à la Maman du ciel afin qu’elle intercède en ma
faveur..."
3-2-2-Au
lit pour toujours...
En avril 1925,
Alexandrina dut s'aliter, pour toujours. Plus personne ne lui disait:
"Courage, tu te relèveras!" Le médecin João de Almeida, de
Porto, craignait une paralysie. Sa sœur Deolinda, couturière, devint
son infirmière, car sa mère travaillait dans les champs. C'est alors
qu'Alexandrina eut "des
moments de découragement, mais jamais de désespoir."
3-2-3-Demandes
de guérison
Alexandrina ayant
été informée des miracles qui s’opéraient à Fatima, demanda, en
1928, à plusieurs personnes de la paroisse parties en pèlerinage, de
prier pour sa guérison. Elle écrit: "N’ayant pas obtenu la
guérison, j’ai compris que je me faisais des illusions, et mes
désirs de guérison ont disparu pour toujours. J’ai commencé alors à
ressentir de plus en plus le besoin d’aimer la souffrance et de ne
penser qu’à Jésus..." Et aussi:
"J’avais un grand regret de ne plus
pouvoir aller à l’église: pour la fête du Sacré-Cœur, ou quand il y
avait une Messe chantée, je pleurais beaucoup. J’ai fini par
comprendre que le Seigneur me voulait malade, c’est pourquoi je ne
lui ai plus demandé de guérir..."
3-2-4-En
1930, c'est l'offrande
Alexandrina écrit:
"Je demandais au Seigneur l’amour de la souffrance et, sans bien
savoir comment, je me suis offerte à lui comme victime. Le Seigneur
m’a accordé cette grâce dans une proportion si importante,
qu’aujourd’hui je n’échangerais la souffrance contre rien de ce qui
peut exister dans le monde. Aimant la douleur, je me sentais
heureuse d’offrir à Jésus mes peines. Consoler Jésus et lui sauver
des âmes, voilà ce qui me préoccupait.
Ô Jésus, je
veux être victime pour les prêtres, victime pour les pécheurs,
victime de votre amour, de ma famille, de votre sainte Passion, des
Douleurs de la Petite-Maman, de votre Cœur, de votre sainte Volonté;
victime du monde entier! Victime pour la paix, victime pour la
consécration du monde à la Maman chérie..."
3-2-5-Puis
l'Appel...
Alexandrina se
souvient: "Je me souviens que bien souvent je demandais au
Seigneur: 'Ô mon Jésus, que voulez-Vous que je fasse?' Et à chaque
fois je n’entendais que ces paroles: 'souffrir, aimer, réparer'."
Elle écrira dans son journal, qu'en 1933 à propos de son offrande
pour les Tabernacles, "de la
chaleur qu’elle éprouvait, de la force qui la soulevait, ni des
paroles qu'elle interprétait comme de simples inspirations de
Jésus."
Le 7 avril 1934,
dans une lettre adressée au Père Pinho, elle avoue: "Ma
souffrance a beaucoup augmenté. Maintenant je ne prends que des
liquides, car je n’arrive pas à mâcher à cause d’un abcès dans la
bouche... J’ai reçu de Jésus un beau présent pour Pâques: en plus
des souffrances physiques, j’ai beaucoup souffert spirituellement.
Je ne comprends pas."
3-3-L'adulte
3-3-1-Nouvelles
épreuves
Nous ne
reviendrons pas sur les missions d'Alexandrina: mission auprès des
tabernacles, et consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie, qui
eut lieu en 1942. Nous rappellerons ci-dessous certains faits
importants qui sont véritablement partie prenante de sa
spiritualité. Ainsi, le 31 octobre 1943, elle commença à vivre les
peines du Purgatoire, puis à partir du 24 octobre 1944, elle eut à
souffrir, jusqu'à sa mort, la Passion intime de Jésus. Enfin, le 29
décembre 1944, ce fut le mariage mystique.
Nous avons vu que
l'une des missions qu'Alexandrina dut accomplir tout au long de sa
vie fut la réparation. Dans ce cadre-là, il faut signaler qu'au mois
de mai 1946 elle eut à vivre au milieu d'odeurs nauséabondes, signes
du péché et de la présence de Satan... Puis, à partir de 1950,
victime consacrée à la réparation, elle endura encore une autre
souffrance, parmi les plus douloureuses: elle sentait l'inutilité de
toute sa vie, de toute son œuvre, de son offrande et de toute sa
souffrance.
3-3-2-Les visites du
public
En 1953
Alexandrina fut dans l'obligation de recevoir des milliers de
visites. Des groupes nombreux venaient la voir et passaient devant
son lit. Le 25 mars1953, plusieurs centaines de personnes, le 9 mai
environ deux mille, le 5 juin cinq mille, le 6 juin six mille, le 29
juin environ quinze mille... Malgré son extrême fatigue, Alexandrina
leur parlait des choses du Ciel, les stimulait au repentir, et cela,
des heures durant: le 9 mai pendant 9 heures et demi avec un arrêt
de 45 minutes, le 6 juin pendant 12 heures avec un arrêt de 45
minutes également. Pendant l'extase du 15 mai 1953, elle entendit
Jésus lui dire: "...Tu vis
la vie publique de Jésus. Courage, courage, épouse très chère!"
En 1954 l'état
physique d'Alexandrina empira gravement. Elle devint presque aveugle
et il lui sembla perdre la foi. Terriblement angoissée elle répétait
des actes de foi: "Je crois, Jésus, je crois que c'est pour moi
que vous êtes né, que c'est pour moi votre Jardin des Oliviers,
votre Calvaire. Je crois, je crois, Jésus, je crois!”
Le 1er
octobre 1954, premier vendredi du mois, après la Passion, Jésus lui
apparut. De ses plaies sortaient des rayons de lumière. Jésus lui
dit: "Comme Je l'ai demandé
à Marguerite-Marie Alacoque, Je veux que toi, à ton tour, tu fasses
se développer dans le monde cet amour éteint dans le cœur des
hommes... Fais, ô mon épouse, fais que se propage dans le monde
entier cet amour des Cœurs de Jésus et Marie.
Au mois d'avril
1955, lors du douzième anniversaire du commencement de son jeûne,
elle entendit Jésus: "Toi qui es dans des ténèbres inégalables,
tu es une lumière qui brille, tu es un phare qui illumine tout: la
ténèbre est pour toi, la lumière est pour les âmes."
Ces ténèbres
durèrent longtemps en 1955, presque jusqu'à sa mort.
3-4-Les vertus
d'Alexandrina
3-4-1-Patience
dans la souffrance
La vie
d'Alexandrina était un martyre constant. Elle écrivit au Père Pinho:
"Même parler m’est douloureux...
Je ne sais pas si c’est grâce aux prières que vous faites pour moi
que je me sens, à chaque heure qui passe, pluse forte dans mes
souffrances; mais je me sens le courage de souffrir de plus en plus,
et j’espère que Notre-Seigneur, petit à petit, augmentera ma douleur
jusqu’à ce que je meure embrasée par son divin Amour, clouée sur la
Croix avec lui...
Depuis seize
années, la maladie, jour après jour, s’est propagée dans tout mon
corps... et depuis dix années je suis prisonnière dans mon lit sans
pouvoir me lever..." Et
encore, dans une lettre de septembre 1934 adressée à Sãozinha:
"Combien j’ai été favorisée
par le Seigneur! Combien suave est le joug sous lequel il me tient!"
3-4-2-La
pureté
Alexandrina avait
une haute idée de la vertu de pureté. Nous savons que c'est pour
échapper à un malfaiteur qu'elle dut sauter par la fenêtre de la
pièce où elle se trouvait et que cette chute fut cause de sa
paralysie et le début de ses souffrances.
3-4-3-La
volonté de Dieu
Les phrases dans
lesquelles Alexandrina affirme son désir de toujours faire la
volonté de Dieu sont innombrables. Nous n'en citerons que
quelques-unes. Après avoir vécu quelques douleurs insolites elle
dit: "Cet étrange phénomène
ne dure pas longtemps, mais il se répète souvent. Je pense que c’est
à cause de mon épine dorsale. Je ne voudrais, en aucun cas, perdre
la raison. J’espère que Notre-Seigneur m’écoute, mais que sa très
sainte volonté soit faite..."
Souvent aussi
elle demande:
— Ô mon Jésus,
que voulez-vous que je fasse?
Et à chaque
fois je n’entends que cette réponse:
— Souffrir,
aimer, réparer!
Lorsque sa
famille perdit tous ses biens, jamais elle ne perdit confiance. Elle
se souvient: "Chez nous, la
joie avait disparu et les choses indispensables nous manquaient.
Mais jamais la soumission à la volonté de Dieu ne m’a manqué;
j’avais une confiance aveugle en lui."
3-4-4-La
vie d'oraison
Alexandrina fut, dès sa tendre enfance, une âme d'oraison. Elle
admirait toutes les beautés de la nature, dès l'âge de neuf ans elle
se perdait dans l’admiration des beautés du Créateur et elle aimait
beaucoup méditer sur le très Saint-Sacrement et sur la Sainte
Vierge. En fait, Alexandrina pensait constamment à Jésus. Cette
intense vie de prière se développa encore plus dès qu'elle fut
paralysée. Elle aimait aussi beaucoup sa "Petite Maman", la Vierge
Marie, à qui elle demandait, l'humilité, l'obéissance, et la pureté,
et elle suppliait Marie:
"Transformez-moi en amour; consumez-moi dans les flammes de l’amour
de Jésus..."
Nous sommes en
1934. Alexandrina écrit: "Â
cette époque, Jésus m'apparaissait, et me parlait souvent. La
consolation spirituelle était grande et les souffrances plus faciles
à supporter. En toute chose je sentais de l'amour pour mon Jésus et
je sentais qu'Il m'aimait, étant donné que je recevais abondance de
tendresses. Je cherchais le silence. Ô comme je me sentais bien dans
le recueillement et bien unie à Lui!... Jésus se confiait à moi. Il
me disait des choses tristes, mais le réconfort et l'amour qu'Il me
procurait, rendaient plus douces ses lamentations. Je passais des
nuits et des nuits sans dormir, à converser avec Lui, dans la
contemplation de ce qu'Il me montrait."
Faut-il rapporter
quelques exemples de ces relations intimes d'Alexandrina avec Jésus?
Elle écrit, au Père Pinho:
"Une certaine fois j'ai vu Jésus tel un jardinier qui soigne ses
fleurs, les arrosant, etc..."
Ou
bien: "D'autres fois il
m'apparaissait pour me montrer les rayons éblouissants de son Cœur.
Une fois j'ai vu la Petite-Maman avec l’Enfant Jésus dans ses bras
et une autre fois je l'ai vue en Immaculée Conception:
Ô combien Elle était belle!..."
Comme tous les
saints Alexandrina connut des périodes de sécheresse. Elle écrit, en
1934: "Cela faisait presque
deux jours que Jésus ne me parlait plus. J’ai pleuré, de peur d’être
dans l’illusion. Quand je me suis un peu rassérénée, j’ai fait la
Communion spirituelle. Mon bon Jésus m’a, alors, parlé ainsi:
— Ma fille, ma
fille très chère, ma bien-aimée, ne t’attriste pas à cause de moi.
Je fais pénétrer en toi mon Amour. Ce fut une bonne préparation.
C’était moi qui te provoquais, pour voir jusqu’où irait ta
confiance. M’aimer dans les douceurs et les tendresses, cela ne
coûte pas. J’ai fait semblant de t’abandonner, de te laisser
naviguer toute seule, sans que tu te sentes dans les bras de ton
Époux, pour voir jusqu’où tu irais. Mais, je ne t’abandonne pas.
Combien Je t’aime! Quand tu te sens froide, c’est moi qui, chaque
fois d’avantage infuse en toi mon amour. Quand Je ne te parle pas,
c’est pour t’inspirer beaucoup plus de foi en moi."
3-4-5-La
charité
Le total don
d’Alexandrina aux milliers de personnes qui frappèrent à sa porte,
pendant les dernières années de sa vie, et qui recevaient son aide
spirituelle et matérielle envers les nécessiteux, au prix d’un
continuel renoncement, sont la preuve de son exceptionnelle charité.
Son sourire si accueillant et rassurant, malgré les douleurs atroces
qu'elle subissait, faisait penser au Cœur du Christ qui se dilate à
l’infini, qui embrasse tout, qui s’attendrit pour tout et
s’identifie en tout avec tous.
"Aimez ceux
qui vous font du mal..."
pourrait être la devise d'Alexandrina. En effet, elle eut de
nombreux ennemis, dans son pays, parmi les membres de la curie
romaine, parmi les prêtres et dans la presse. Dans son journal elle
écrivit: "J’aime ceux qui
m’aiment; j’aime les justes et les pécheurs; j’aime ceux qui me
blessent parce que je vois en eux Jésus et je les aime tous par
amour de Jésus."
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