Alexandrina
et la Consécration du monde à Marie

Nous nous étions quittés, la fois dernière, aux prémices de
la consécration du monde au
Cœur Immaculé de Marie, dont Alexandrina fut un
instrument infatigable et certain.
En effet, dans la “Positio” de la Sacré Congrégation
pour la cause des saints, nous pouvons lire la phrase suivante: « En 1936,
sur l'ordre de Jésus, Alexandrina demanda au Saint-Père, par l'intermédiaire du
Père Pinho,
la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie. »
Nous avions vu que le Seigneur lui avait dit que la
révolution espagnole était un châtiment, en lui précisant qu’il était « grand,
le danger, que ce fléau et que les actes de barbarie se répandent » dans
l’univers entier. Comme remède à ces maux, Jésus demandait donc la consécration
du monde au Cœur de sa Mère bénie, en donnant comme signe visible de sa demande,
la passion vécue par Alexandrina.
Le jésuite, Père Mariano Pinho, directeur spirituel de la
servante de Dieu, avait écrit au Cardinal Pacelli — futur Pie XII — Secrétaire
d’État de Pie XI pour l’informer des événements de Balasar et des demandés
réitérées de Jésus à sa confidente sur la consécration du monde.
Quelques mois plus tard, une enquête fut alors ordonnée par
le Saint-Siège, comme nous l’avons dit et les choses en restèrent là.
Jésus avait dit à Alexandrina :
— Je vais te dire comment sera faite la consécration à la
Mère des hommes et ma très sainte Mère, que j’aime tant! Ce sera à Rome: le
Saint-Père lui consacrera le monde, l’invoquera sous le titre de “Reine du
Monde”, “Notre-Dame de la Victoire”! Puis, les prêtres feront de même, dans
toutes les églises de l’univers. Ne crains rien; mais desseins s’accompliront.
Mais, la prudence de l’Église dans de tels “cas”,
entraîne souvent des “retards” dans l’exécution des plans divins. En
attendant le temps connu de Dieu, Alexandrina s’offrait comme victime, pour la
paix, pour les pécheurs et, bien entendu, pour la consécration du monde à Marie.
Puis, le 25 avril 1938, Jésus devient plus exigeant, beaucoup plus pressant: Il
lui ordonna de communiquer au Père Pinho sa divine volonté :
— Dis-lui qu’il faut qu’il écrive au Saint-Père, en lui
demandant, de ma part, la consécration du monde au Cœur Immaculé de ma très
sainte Mère. Mais que le monde sache pourquoi il lui est consacré: Je veux
pénitence et prière... Toi, tu auras beaucoup à souffrir, tant que mes desseins
ne seront pas accomplis.
Une nouvelle lettre fut alors envoyée au Cardinal Pacelli,
lui rendant compte des nouvelles instances divines.
Entre-temps, Jésus avait promis à Alexandrina « de
conduire le Saint-Père, droit au ciel, sans passer par le purgatoire, s’il
faisait la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie. »
Monseigneur Manuel Vilar qui, comme nous l’avons vu
précédemment, avait été chargé de l’enquête, écrivit à Alexandrina, dès son
arrivée à Rome: « Je n’ai pas encore vu le Saint-Père; sitôt que je le
verrai, je lui ferai connaître les “désirs de Notre-Seigneur”. »
Puis, le 2 juin 1939, répondant à une lettre de la servante de Dieu, il
écrivait: « C’est le premier vendredi de juin. Votre lettre — que j’ai
tant aimée — m’est parvenue il y a presque un mois. Je croyais pouvoir
vous donner, aujourd’hui, de bonnes nouvelles concernant la “Consécration du
monde au Cœur Immaculé de Marie”, si instamment demandée par Jésus; mais,
malheureusement, il n’y a encore rien de positif à vous communiquer. Les choses,
à Rome, sont “éternelles”! On n'y est jamais pressé... »
Monseigneur Vilar, comme nous l’avons vu, croyait sincèrement
aux “faits de Balasar” et faisait tout son possible pour faire aboutir
les demandes divines.
“Je comprends — écrivait-il à Alexandrina— que
l’Amour soit, aujourd’hui, pour vous, à la fois: “le bourreau... le
soutien... la force... la consolation... la félicité...” Laissez-le faire.
S’il exige que votre immolation soit portée à l’héroïsme, plus grande sera la
gloire du Seigneur; plus complète la réparation; plus belle votre récompense.
Dans cette époque d’égarements, Jésus a besoin de victimes qui apaisent la
Justice divine.”
Puis, comme pour montrer clairement qu’il s’intéresse
vraiment au “cas” d’Alexandrina, il lui écrivit de nouveau, le 3 juillet
1940, pour lui dire: “Au début de juin dernier, quelqu’un
a parlé au Saint-Père de la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie.
Mais le temps est si mauvais!...” Et pour cause, la guerre faisait déjà
rage!...
Et vu que les hommes tardent, Jésus insiste.
— Je te promets de venir, bientôt, te rappeler à moi ;
d’accorder, dans le ciel, à tes prières et à ton amour, tout ce que tu as mérité
d’obtenir, sur la terre, par tes souffrances. Mais, ma fille, prie le Saint-Père
d’avoir pitié de ton martyre, en réalisant — sans tarder — les desseins de ton
Jésus, c’est-à-dire, en consacrant le monde au Cœur de ma bienheureuse Mère.
Alexandrina ne sait pas quoi faire. Elle prie, elle souffre,
mais la décision de consacrer le monde à la Maman du ciel, semble bloquée. Elle
s’en plaint à Jésus:
“O mon Jésus, il me semble que le Saint-Père ne nous
exauce pas... Il tarde tant !...”
— Ma fille — lui répond le Seigneur, comme pour la
réconforter — sois tranquille, le Saint-Père vous exaucera... le jour de la
glorification arrivera...
Pendant ce temps, à Fatima, le Père Mariano Pinho,
prêche une retraite spirituelle à tous les évêques portugais, réunis autour de
lui dans la Basilique de Cova da Iria. Il leur parle des demandes si souvent
réitérées de Jésus à sa dirigée. Les évêques sont d’accord que l’on fasse
“quelque chose”, afin que cette consécration soit menée à bien. Avec l’accord,
et la signature autorisée de tous les évêques présents, le Père Pinho rédige, en
latin, une lettre qu’il adressa à Pie XII, où il lui demandait de faire cette
consécration, d’autant plus que cela coïncidait avec le 25 anniversaire des
apparitions de la Vierge à Fatima, mais que cela coïncidait aussi aux
anniversaires de son ordination sacerdotale et épiscopale — 13 mai, toutes les
deux!
Sensibilisé, peut-être, par ce rappel très personnel, le Pape
commence à y réfléchir sérieusement...
Entre-temps, Alexandrina écrivit, elle aussi, au Saint-Père
pour le soutenir dans ses souffrances, motivées par la guerre; motivées aussi
par le danger que sa propre vie courrait. Il a été question de faire prisonnier
le Pape et tout le Collège des Cardinaux.
Le 27 mars 1942, elle vécut la passion pour la dernière fois
— de façon visible. Or, comme Jésus avait dit à la jeune victime qu’elle
les endurerait jusqu’à ce que le Saint-Père se décide à consacrer le monde, un
grand espoir illumina les cœurs de ceux qui, mis au courant des moindres détails
des “faits de Balasar”, ont vu dans cet arrêt un “signe”
avant-coureur de l’aboutissement des demandes divines.
Et en effet, le 22 mai 1942, Notre-Seigneur, parlant par les
lèvres de son épouse, disait d’un ton joyeux:
— Gloire! Gloire ! Gloire à Jésus ! Honneur et gloire à
Marie ! Le cœur du Saint-Père, cœur d’or, est décidé à consacrer le monde au
Cœur Immaculé de Marie.
Quel bonheur, quelle joie, pour le monde, d’être consacré,
d’appartenir, plus que jamais, à la Mère de Jésus !
Le monde appartient déjà au divin Cœur de Jésus; il va
désormais appartenir de même, au Cœur Immaculé de Marie !...
Quelques jours plus tard, dans un transport d’amour dont
Alexandrina avait le secret, le cœur rempli de joie, elle prie :
— Ave Maria, Mère de Jésus ! Honneur, gloire, triomphe
pour votre Cœur Immaculé ! Ave Maria, Mère de Jésus, Mère de tout l’univers !
Qui ne voudrait pas appartenir à la Mère de Jésus, à la Dame de la victoire ? Le
monde va bientôt être consacré tout entier à votre Cœur maternel ! Accueillez ;
Vierge pure, accueillez, Vierge Mère, dans votre Cœur très saint tous vos
enfants.
En effet, le Pape Pie XII, le Pape marial par excellence,
avait, au plus profond de son cœur, pris la décision de satisfaire à la demande
divine, pressé, il est vrai, par de nombreuses demandes, émanant de diverses
parties du globe.
Prenant comme prétexte le 25e anniversaire
des apparitions de Notre-Dame à Fatima, il annonça alors son intention de
consacrer le monde au Cœur Immaculé de la Reine du ciel et de la terre.
Le Saint-Père fit cette consécration une première fois, en
portugais, le 31 octobre 1942.
Cette consécration fut pour Alexandrina un motif d’intense
joie. Écoutons-la:
« Quand, par télégramme, j’ai eu la nouvelle de la
consécration du monde à la chère Maman du ciel, Jésus m’accorda de courts
instants de consolation. Au comble de ma joie, je ne savais comment remercier
Jésus et Marie. Les mains levées vers le ciel, je me suis exclamée:
— Béni soit Jésus! Bénie soit la Petite-Maman!
J’avais envie, à ce moment-là d’introduire moi-même le
Saint-Père dans les Cœurs de Jésus et Marie: quelle joie!... »
Mais la cérémonie solennelle du 8 décembre 1942, reste, pour
la postérité comme la date officielle de cette célébration universelle, car ce
fut à cette date, en effet, que toute l’Église était unie dans un même esprit
d’amour et d’union de prières aux pieds de la Maman du ciel, non seulement pour
se consacrer à Elle, mais pour lui demander de bien vouloir intercéder auprès de
son divin Fils pour que l’on ait la paix.
Il convient, ici, de faire une mise au point sur cet acte de
consécration, car, quand il en est question, tous, ou presque tous, même des
historiens sérieux et compétents, pensent immédiatement à Fatima...
A Fatima, en effet, la Vierge Marie a parlé de
consécration, mais de la consécration de la Russie; jamais de la
consécration du monde. Rappelons-nous les paroles de notre Maman le 13 juillet
1917 aux pastoraux:
“Je viendrai demander la consécration de la Russie à
mon Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Si l’on
écoute mes demandes, la Russie se convertira et on aura la paix.”
Lucie, la seule survivante des apparitions de Fatima, l’a
confirmé, elle-même, lors d’un entretien qu’elle accorda au Père De Marchi et où
elle avoue que ce fut « sur suggestion de mon directeur spirituel, j’ai
ajouté “et du monde” de moi-même. »
Plus tard, le Père Umberto Maria Pasquale, salésien et
deuxième directeur de la servante de Dieu, sœur Lucie écrivait :
“Révérend Père Umberto;
En réponse à votre demande, je vous déclare:
— Notre-Dame, à Fatima, dans sa demande, ne fait référence
qu'à la Consécration de la Russie.
Dans la lettre que j'ai écrite au Saint-Père Pie XII
—
sous le conseil de mon directeur spirituel
—
j'ai demandé la consécration du monde, avec mention explicite de la Russie.
Reconnaissante et, en union de prières.
Coimbra, 13 avril 1980
Sœur Lucie.”
Nous ne cherchons pas à polémiquer, mais uniquement à
rétablir un fait historique qui éclaire, d’un jour nouveau, le charisme et la
mission de la servante de Dieu.
Il nous faut encore préciser que l'évêque de Gurza — Mgr
Manuel Ferreira da Silva, qui était le confesseur de Lucie — avait, avec tous
les autres évêques, signé la demande de consécration du monde, envoyée en 1938,
à Pie XII, selon la demande faite par Jésus à Alexandrina et que le Père Mariano
Pinho avait rédigé lui-même en latin, comme nous l’avons dit. Ceci étant
expliqué, continuons notre tâche qui est celle de mieux vous faire connaître et
aimer, cette âme d’exception, dont le Seigneur voulut avoir besoin, par amour
pour nous.
Et, après la consécration du monde au
Cœur Immaculé de Marie, qu’est devenue Alexandrina ?
Elle continua sa mission de victime volontaire pour le salut
des âmes, souffrant toute sorte “drames” avec le même amour et le même et
inaltérable désir de faire en toute chose, avec joie, et au plus haut degré, la
seule volonté de Dieu.
En 1943, du 10 juin au 20 juillet, par décision de
l’archevêque de Braga, diocèse où elle était née, Alexandrina fut soumise, dans
un hôpital de Porto, à une surveillance aussi étroite que pénible, voire même
vexante, sur certains aspects.
Il fallait, selon les “experts” prouver qu’Alexan-drina ne
mangeait pas, ne buvait pas et n’évacuait pas non plus. Pour ce faire, un
hôpital fut choisi et on l’y interna. Elle y était, toute seule — sa sœur ayant
été interdite de pénétrer dans la chambre — et “gardée“ par deux
assistantes toutes vouées au docteur Araujo, chef de l’Établissement.
Ce que la pauvre Alexandrina y souffrit d’incom-préhensions,
vexations et autres vicissitudes, serait trop long à rapporter ici. Nous vous
renvoyons à l’Autobiographie qui paraîtra bientôt, nous l’espérons.
Dans cet écrit de la servante de Dieu, comme dans les lettres
à ses directeurs spirituels, il y a matière à méditation; il y a des pages qui
sont dignes des plus grands mystiques, comme sainte Thérèse d’Avila, saint Jean
de la Croix, sainte Catherine de Sienne, et bien d’autres.
Revenue chez elle, après le séjour forcé à l’hôpital de
Porto, elle continua sa mission de victime volontaire pour les pécheurs et tout
particulièrement pour les Tabernacles, où le Seigneur habite dans le plus grand
abandon et oubli de la part des hommes.
Son amour pour l’Eucharistie la mènera à demander à Jésus de
mourir, si possible un jeudi ou tout autre jour rappelant le Sacrement d’Amour.
Mais elle aimerait rendre son âme à Dieu, par les mains de Marie et dans un jour
consacré à Elle aussi... Difficile de concilier les deux? Souvenons-nous de
l’Évangile: “A Dieu rien n'est impossible”.
Le 1er octobre 1949, la Sainte Vierge lui apparut
et lui offrit un Rosaire, ainsi que le scapulaire du Carmel. Pendant les années
qui suivirent, Alexandrina eut d’autres apparitions analogues.
1953 fut une année exceptionnelle en ce qui concerne
l'évidence surprenante de l'action divine sur Alexandrina: ce n'est que
d'en-Haut, en effet, que pouvait lui venir une telle condition physique, une
telle force pour supporter le poids de tant de fatigues accumulées à la suite
des milliers de visites qu'elle reçut en cette période. Ils passaient devant son
lit par groupes. Le 25 mars plusieurs centaines, le 9 mai environ 2000,
le 5 juin 5000, le 6 juin 6000, le 29 juin environ 15000.
Elle leur parla des choses du Ciel, les stimula au repentir, des heures durant.
Le 9 mai pendant 9 heures et demie avec un arrêt de 45 minutes; le 6 juin
pendant 12 heures avec un arrêt de 45 minutes également.
Pendant l'extase du 15 mai elle entendit Jésus lui
dire:
Tu vis la vie publique de Jésus. Courage, courage, épouse
très chère!
A la suite de ces extases, quand Alexandrina finissait de
revivre la Passion, elle sentait en elle Jésus ressuscité qui, à travers ses
lèvres s'adressait à l'humanité, aux pécheurs, d'une façon attristée et
solennelle. Alexandrina parlait longtemps avec chaleur, fréquemment elle
chantait les beautés et les exhortations de Jésus. Elle chantait des hymnes de
louange, d'action de grâces, de repentir, de supplique. D'autres fois elle
chantait en colloque avec Jésus qui lui demandait son amour et elle Lui en
offrait.
25 décembre — elle eut sa dernière extase publique:
— « Je suis descendu du ciel et me voici pour la dernière
fois dans le cœur de mon épouse pour parler à travers ses lèvres ».
Cette extase se termina par un chant d'adieu et d'au-revoir
au Ciel.
L’année 1954 fut l’avant dernière de sa vie. Son état
physique continua d’empirer. Elle devint presque aveugle. « Le corps
ressemble à l'âme: il n'a pas de vie, pas de lumière », peut-on lire encore
dans son Journal du 24 décembre.
Au mois d'avril de cette même année ce fut le 12e
anniversaire du commencement de son jeûne. Elle entendit de Jésus ces paroles:
— « Ma fille, Je t'ai placée dans le monde et Je fais en
sorte que tu vives uniquement de Moi pour prouver au monde ce que peut
l'Eucharistie, ce qu'est Ma vie dans les âmes: lumière et salut pour
l’humanité » — elle ne vivait que de la Communion quotidienne
1 octobre — premier vendredi du mois, après la
Passion, Jésus lui apparut. De ses plaies sortaient des rayons de lumière,
lesquels allaient frapper les plaies de ses pieds, des ses mains et de son cœur.
Elle entendit Jésus lui dire:
— « Comme Je l'ai demandé à Marguerite-Marie [Alacoque],
Je veux que toi, à ton tour, tu fasses se développer dans le monde cet amour
éteint dans le cœur des hommes... Fais, ô mon épouse, fais que se propage dans
le monde entier cet amour de nos Cœurs! » (de Jésus et Marie).
Pendant cette dernière période de sa vie, elle expia de façon
particulièrement douloureuse les péchés contre la foi et contre l'espérance.
Mais nous voici arrivés à la dernière année: 1955.
Le 7 janvier Jésus lui fit comprendre que cette année
serait l'année de sa mort.
— Tu es dans ton année! Tu es dans ton année! Tu es dans
ton année! Confie-toi, confie-toi à moi.
Je ne manque jamais à ce que je promets. Mes promesses de
Seigneur Suprême, Tout-Puissant, vont se réaliser. Ta mission sur la terre va
vite finir.
Confiance ! Confiance ! Le ciel est à toi ; tu y
continueras ta mission...
Malgré cela, la lutte pour la foi continua toujours
intensément.
Dans son dernier Journal, le 2 septembre l'on peut lire:
Dans une angoisse lancinante je répétais mes actes de foi:
“Je crois, Jésus, je crois que c'est pour moi que vous êtes né, que c'est pour
moi votre Jardin des Oliviers, votre Calvaire. Je crois, je crois, Jésus, je
crois!”
Mon abîme était noir et si profond que seul Dieu pouvait y
pénétrer: c'est que fit Jésus. Il est descendu jusqu'à mes profondeurs, ramena à
la superficie mon pauvre être et l'illumina avec quelques rayons de Sa lumière.
— Viens ici, Ma fille, lumière et flambeau du monde! Toi
qui es ténèbre inégalable, tu es lumière qui brille, phare que tout illumine: la
ténèbre est pour toi, la lumière, elle est pour les âmes.
Viens ici, lumière dont Je suis la source, phare dont Je
suis le phare.
Puis, à l’approche de l’échéance dernière, la veille même, ce
fut le Seigneur Lui-même qui, vers huit heures du matin, juste après la
Communion, lui conseilla:
— Ma fille, c’est, maintenant le moment de demander ce que
tu désirais — l’Extrême-Onction. Tu vas au ciel... Tu vas au ciel!...
Et le cœur en joie, Alexandrina répétais continuellement :
Je veux le ciel... Je ne regrette pas la terre. Il n’y a
plus de ténèbres dans mon âme; tout y est soleil... vie... tout y es Dieu.
Ce même jour, vers 15 heures, après avoir fait un acte de
résignation et d’acceptation de la mort, Alexandrina demanda pardon à sa mère, à
sa sœur, à son confesseur, le Père Alberto Gomes, à monsieur le Curé et aux
médecins présents, ainsi qu’à toutes les autres personnes qui se trouvaient
alors chez elle; ensuite, elle ajouta:
Mon âme sera-t-elle, maintenant, assez pure pour recevoir
l’Extrême-onction? Mon Dieu, je ne peux plus demeurer sur la terre. Oh! Jésus,
Jésus, Jésus!
J’ai tout souffert pour le salut des âmes! J’ai été
desséchée, broyée, dans ce lit!
J’ai donné ma vie..., mon sang... pour les âmes! Je
pardonne à tous, oui, je pardonne... je pardonne à ceux qui ont été des
instruments, dans les mains de Dieu, pour mon plus grand bien...
Jésus, pardonnez à tout le monde!
Après cet épanchement plein d’amour et de tendresse, le curé
lui administra l’Extrême-Onction. A cet instant, le regard tourné vers le ciel,
Alexandrina dit encore:
Oh ! quelle clarté ! Tout est lumière ! Il n’y a plus de
ténèbres ! Tout a disparu !...
13 octobre 1955. Il est six heures du matin quand, du
plus profond de son âme, Alexandrina s’exclama:
Mon Dieu, mon Dieu, je vous aime! Je suis toute à Vous!
J’ai besoin de partir! Je n’aimerais pas mourir pendant la nuit... mais je
serais contente de mourir aujourd’hui!...
Le 13 octobre est la date anniversaire de la dernière
apparition de la Sainte Vierge à Fatima. Alexandrina aimerait, avait-elle dit,
mourir en un jour consacré à la Maman du ciel, mais aussi en un jour
eucharistique. Ce fut un jeudi que Jésus institua l’Eucharistie. Il se trouve
que le 13 octobre 1955 était justement un jeudi. Le Seigneur avait exaucé les
deux souhaits de sa fidèle épouse.
Les funérailles d’Alexandrina furent grandioses. De tous les
endroits du Portugal, à l’annonce de son décès, par milliers les gens sont
venus; à pied, en voiture, en autocar, par le train. Le petit village eut
beaucoup de mal à contenir tout ce peuple simple et reconnaissant qui voulait
rendre un dernier hommage à celle qui pendant toute une vie de prière, avait été
le paratonnerre auprès de Dieu; celle qui pendant plus de treize années ne
s’était alimentée que de la sainte Hostie et qui partait maintenant, recevoir,
dans la Maison du Père, la récompense de toutes ses souffrances.
Le procès informatif diocésain en vue de la béatification fut
terminé en 1973. Le 31 janvier 1983, le décret d’introduction de la cause de
béatification auprès de la Congrégation pour la Cause des Saints, fut signé.
Le 8 janvier 1991, le Postulateur Général, Père Luiggi Fiora,
présenta officiellement, à la même Congrégation le “Positio super virtutibus”
où est recueillie toute la documentation, sur la base de laquelle fut reconnue
l’héroïcité de ses vertus.
Et maintenant... il ne nous reste qu’à prier le Seigneur de
bien vouloir, dans son Amour miséricordieux, nous accorder la grâce de voir
bientôt glorifiée celle qu’Il se choisit Lui-même comme instrument pour la
consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie.
Prions aussi notre Maman du ciel, la “Mãezinha”, comme aimait
l’appeler Alexandrina, qu’Elle veuille bien intervenir auprès de son divin Fils,
afin que, non seulement les portugais se réjouissent de voir glorifier leur
compatriote, mais chacun de nous; car tout chrétien se réjouit de la
glorification de l’un de ses frères.
NOTA DE L’AUTEUR :
Alexandrina fut béatifiée par
le Pape Jean-Paul II le 25 avril 2004.
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